jeudi 9 juin 2016

COLD COMFORT FARM


COLD COMFORT FARM

( LA FERME DE FROID ACCUEIL )

(EDIT Juillet 2016 : une nouvelle version française est parue sous le titre LA FERME DE COUSINE JUDITH )

à noter qu'une adaptation télévisée est paru en 1995 sous le titre "La Ferme du mauvais sort"

Ce roman, je me souviens maintenant, c'est chez Karine:) que je l'avais repéré. Il y avait quelque chose de loufoque et de divertissant façon jubilatoire là-dedans qui me parlait bien. Une promo ebook et le livre s'est retrouvé dans mon ePAL. Les mois sont passés et j'ai complètement oublié ce livre qui me tentait de moins en moins. Avec les années, j'ai fini par l'associer à du feel-good à l'anglaise, instant thé cocooning, bonnes moeurs, du convenu, classique et déjà-vu, un brin désuet, pas désagréable mais pas urgent, voire contournable.
Bref, je n'avais plus trop envie de me perdre dans la campagne anglaise. Le mois anglais est donc tombé à pic pour rétablir Stella Gibbons dans son bon droit.

Dès les premières pages, en effet, avant même que l'histoire ne commence en fait, je dois dire que cette chère Stella n'a pas manqué agréablement me surprendre et elle n'allait pas finir de le faire tout le long du récit. Une note introductive indiquait que l'action du roman (paru en 1932) se déroulait dans un futur proche. Roman "d'anticipation" donc ? :-) Hé bien, figurez-vous que oui car Stella Gibbons imagine quelques évolutions technologiques dont les vidéophones ! Skype avant l'heure, tout de même ! :-)

L'histoire est assez basique. C'est celle d'une citadine, Flora, qui débarque à la campagne, dans le Sussex, dans la ferme de quelques cousins éloignés. On se frotte les mains à l'avance à l'idée de ce roman qui pourrait aligner tous les clichés du genre et nous amuser de ce choc des civilisations et des cultures (façon Jane dans la jungle), et en réalité, il ne manque pas de le faire mais avec beaucoup d'habileté, jouant de la parodie par moment, et c'est là que c'est assez jubilatoire.
Une malédiction semble s'être abattue sur cette ferme où la vie a autant de vivacité, d'enthousiasme et d'espoir qu'au château de la Belle au bois dormant, gardé ici par l'ombre de la maléfique Tante Ada, crainte de tous. Flora, en bonne marraine la Fée terriblement mêle-tout, ne se laisse jamais démonter (et ça, c'est fort drôle) et est bien décidée à changer tout ça à sa façon, mettant son nez dans les affaires de tout ce petit monde, une galerie de personnages hauts en couleur, truculents, à l'accent à couper au couteau (un délice à la lecture).
Tout le monde en prend pour son grade, Flora inclus, et j'ai apprécié ce dernier aspect. Stella Gibbons enchaîne les situations cocasses et les réflexions désopilantes ou empruntes d'une drôlerie inattendue, assaisonnant le tout d'un brin de dérision, d'exagération et de moquerie, mais rien de bien méchant. C'est une romancière qui a bien cerné la nature humaine et j'ai trouvé ça juste délectable.

Rapidement, l'auteure m'est devenue très sympathique, comme une bonne amie rigolote qu'on aime à voir et écouter car on sait qu'on ne s'ennuiera pas une seconde avec elle, qu'on sera toujours charmé par ses plaisanteries et ses idées folles, mais surtout par son authenticité. Pas de calcul, un côté un peu brut de pomme et des réflexions pas piquées des vers, dont certaines m'ont arraché des sourires de hyène hilare.

En rencontrant sa cousine de la campagne, Judith Starkadder, pour la première fois :
"So, Flora mused, must Colombus have felt when the poor Indian fixed his solemn, unwavering gaze upon the great sailor's face. For the first time a Starkadder looked upon a civilized being."

"She liked Victorian novels. They were the only kind of novel you could read while you were eating an apple."

"It was quite interesting : like having tea with a rhinoceros."

"He went on blowing it, and staring at her. Flora wanted to set him at his ease (if he had an ease ?) so she composedly went on with her tea [...]."

"She began to make conversation. "How is the well getting on ?" (Not that she cared)."

Stella Gibbons pourrait faire partie de cette vague de romancières so British parlant thé, campagne, petits désordres et arrangements amoureux, dignes héritières des Austen & co, mais je crois qu'elle a un petit truc en plus. Un petit truc en plus qui m'a beaucoup plu car il sonne un peu comme "je ne sais pas si ce que j'écris c'est de la littérature, mais en fait, je m'en fous", "à prendre ou à laisser".
Personnellement, j'ai vraiment beaucoup aimé son écriture qui s'adresse au lecteur en de multiples clins d'oeil et s'attache vraiment à l'amuser, avec ses parenthèses qui laissent bien entendre le fond de la pensée de Flora.

Une comédie rupestre rafraîchissante et enchanteresque, aux allures de contes de fée, sans bons sentiments mais un poil feel-good quand même. On en ressort ragaillardi, sourire aux lèvres. Un peu too much vers la fin quand même, tout est trop bien qui finit bien, un peu facilement, et, allez, une petite déception, attention SPOILER celle de ne pas savoir au final ce que la grand-mère a vu dans le hangar ni ce qu'Amos a fait au père de Flora, mais à la limite, je dirais que j'admire même Stella Gibbons de nous faire ce coup-là !

L'auteure
Stella Gibbons est une romancière et poétesse anglaise née à Londres en 1902. Son premier roman Cold Comfort Farm paru en 1932 a reçu un prix et a établi sa réputation.

Intègre le  

14 commentaires:

  1. Bon, OK, je dois lire cette auteur (j'ai juste lu Le bois du rossignol, pas mal pas mal du tout...)

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    1. Aaah si tu peux lire Cold Comfort Farm en anglais (je crois que la traduction française de l'époque est maintenant introuvable et ça n'a jamais été retraduit ou réédité en VF depuis), ne te prive pas !!

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  2. Je la lirai en français, dans les titres traduits, il me tarde de découvrir Stella Gibbons !

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    1. Je suis bien tentée par Le Célibataire. Quelque chose dans le titre et la thématique me laisse entendre que ça pourrait être un très bon moment de lecture.;-)

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  3. Je note avec avidité ! objectif de l'an prochain (voire avant si possible) : découvrir ENFIN Stella Gibbons !

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    1. J'avoue que je ne m'attendais pas à être aussi agréablement surprise par cette auteure, aussi je t'encourage vivement à la découvrir au plus vite.;-)

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  4. Malgré les petits trucs en plus, je vais passer mon tour sans regret^^

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    1. Ahaha, c'est peut-être trop soo British pour toi, j'avoue.;-)

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  5. Ce que tu en dis me tente bien, en tout cas j'aime beaucoup la couverture!

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    1. Elle est particulièrement chouette, oui !:-) Il y en a une autre que j'aimais bien avec la tête d'une vache en gros plan. J'ai hésité entre les deux.:-)

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  6. En fait c'est la couverture qui m'a fait fuir, celle de la réédition française est beaucoup plus jolie. C'est un roman décalé et un peu barré, j'ai beaucoup aimé finalement.
    (et je crois que la grand-mère n'a rien vu du tout, c'est juste une grosse mytho !)

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    1. Oui les couv' de la collection Vintage de Belfond sont assez chouettes (vraiment ravie qu'ils aient réédité ce roman en français) mais j'aime bien l'anglaise. Il y a un côté Roald Dahl, ou même saga Malaussène de Pennac, qui évoque quelque chose de barré décalé, qui ne se prend pas au sérieux, ce qui n'empêche qu'il y a du fond et qu'on passe un bon moment de lecture.
      Pour la grand-mère, oui, probable.;-)

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  7. Vu aussi chez Keisha et noté je ne suis pas trop fan de farfelu mais j'ai envie de lire cette auteure

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    1. Enfin, ce n'est pas farfelu façon déjanté, avec de gros délires, mais l'auteure s'amuse bien avec ses personnages et son récit. J'ai vraiment bien aimé ce roman, contre toute attente, et je le recommande bien volontiers.

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