THE ORENDA
( DANS LE GRAND CERCLE DU MONDE )
À l'origine, il y eut le Festival America, et des échos sur place des grandes qualités de ce livre. Ensuite, j'ai croisé l'auteur, Joseph Boyden, enfin, ses beaux yeux clairs, alors retour sur le stand où se trouvait son livre en pile. Aaaah, ça parle d'Indiens d'Amérique, et en plus côté Canada, au 17è siècle. Aha ! Et en plus, les critiques sont dithyrambiques ! OK, je craque.
Ce roman tant convoité sous une impulsion déraisonnée a pourtant failli faire partie des romans que je n'arrive jamais à caser dans mes projets lecture imminents. Je n'aurais pu le lire qu'en 2025 malgré ma bonne volonté, si ce n'est une lubie surgie de FB où, avec Cryssilda, ma copiotte du challenge UE (un livre lu = un resto), et une troisième comparse, nous nous lançons dans l'idée farfelue d'un challenge "crudités" pour justifier un restaurant crudivore qui, a priori, vaut le détour. Et qui dit "crudités" dit "nature writing". Hé oui, toute logique est permise quand on est un peu barré !
Un calvaire en réalité ce challenge fantaisiste, pour moi qui ne suis ni "crudités", ni "nature writing", mais je résiste assez difficilement à l'appel du ventre quand même, et cela combiné aux livres et aux challenges, j'étais foutue...
C'est alors que j'ai pensé à ce roman et que je me suis dit que c'était une excellente opportunité de le sortir de son avenir presque assuré de vieille PAL.
En fait de "nature writing", c'est tout de même davantage un roman historique et d'aventures, quoique j'ai bien grelotté dans le froid et vécu au rythme de la nature avec les Indiens. Disons que c'est une combinaison des trois, ce qui fait que le "nature writing" pur, qui passe assez difficilement avec moi, a plutôt bien glissé.
Pour en venir au roman à proprement parler, oui, c'est du bon gros roman historique et d'aventures, traversé d'un souffle épique qui m'a fait vibrer au-delà des dernières pages (coeur serré). Une histoire formidable à trois voix que j'ai mis du temps à apprivoiser tout de même mais que je n'ai jamais vraiment pu lâcher un instant tellement j'étais prise dans les récits. Trois voix, celle du père et chef huron, celle de sa fille adoptive iroquoise (Hurons et Iroquois étant des ennemis jurés), et celle du Jésuite, Christophe. Trois voix qui témoignent de l'évolution subtile et dramatique de l'histoire des Indiens d'Amérique. Trois voix que rejoignent d'autres, propulsant ce récit dans une formidable aventure humaine, quoique profondément tragique. Trois voix auxquelles je me suis attachée au final, des personnages que j'ai fini par apprécier alors que je les trouvais entre quelconque et pénibles au départ. L'évolution de leurs relations était particulièrement intéressante.
Un pan de l'histoire magnifiquement romancé, très instructif sur la vie et les coutumes des Indiens d'Amérique du Nord, sur la façon dont l'arrivée des Européens a perturbé leur équilibre, et quelque part, détruit leur univers. Les derniers événements qui ont fait l'actualité cruelle en France faisaient d'ailleurs écho avec certains événements dans ce livre, notamment avec l'insistance des Jésuites pour convertir les Indiens à leur foi, le rejet de ces derniers, qui maintiennent tout de même les échanges par intérêt pour les armes et autres objets que les Européens peuvent leur fournir. Les échanges entre Jésuites et Indiens étaient particulièrement intéressants sur les différences de culture, assez drôles même parfois.
J'ai aimé aussi le côté très réaliste du récit, dans la psychologie et le comportement des personnages, à l'opposé de tout manichéisme. Personne n'est tout blanc, tout noir, c'est un drame humain qui se déroule sous nos yeux, et tout le monde a sa part de responsabilité dans l'histoire.
Le gros bémol, et il est de taille, c'est la mention incessante et la description des tortures de l'époque chez les Indiens. J'en transpirais à grosses gouttes à chaque page, me demandant si j'allais survivre psychologiquement à ce livre, me demandant même par moment s'il ne valait pas mieux que j'arrête ma lecture en cours de route. Et ça, peu d'avis le mentionnent (pour ceux que j'ai lus du moins), et même, je n'en ai trouvé qu'un aussi horrifié et écoeuré que moi par cet aspect du récit. Cela m'a même mise terriblement en colère que personne n'en parle, ne pensant qu'à porter ce roman aux nues, même s'il le mérite.
Alors je le dis, AVERTISSEMENT : ÂMES TRÈS SENSIBLES S'ABSTENIR ! Les tortures, plus que le "nature writing", c'est un des plus difficiles moments que je puisse traverser en lecture. C'est quasi cauchemardesque, j'en frissonne, j'y pense et repense, d'autant plus que, telle l'Inquisition, je sais que c'étaient des pratiques avérées.
Alors je le dis, AVERTISSEMENT : ÂMES TRÈS SENSIBLES S'ABSTENIR ! Les tortures, plus que le "nature writing", c'est un des plus difficiles moments que je puisse traverser en lecture. C'est quasi cauchemardesque, j'en frissonne, j'y pense et repense, d'autant plus que, telle l'Inquisition, je sais que c'étaient des pratiques avérées.
Malgré tout, je voudrais ajouter un bémol à mon propre bémol, c'est que bizarrement, j'ai fini par m'y faire sur la fin, "acceptant" cette pratique pour le moins barbare comme faisant partie intégrante de la culture indienne, un peu à la façon du seppuku chez les Japonais.
En dépit de ces moments très difficiles, j'ai donc passé un très très bon moment de lecture, culturellement et historiquement instructif.
L'auteur
En quelques livres, Joseph Boyden est devenu l'un des grands noms de la littérature canadienne contemporaine. Traduit en près de vingt langues, couronné par plusieurs grands prix littéraires, il a publié deux romans, Le chemin des âmes et Les saisons de la solitude, et un recueil de nouvelles, Là-haut vers le nord.
Ton bémol final me refroidit, il y a eu quelques tortures dans Le fils, et j'ai encore ça en tête... Oui, je sais que c'était la coutume, mais les descriptions je n'en veux pas.
RépondreSupprimerMerci quand même de mettre le nature writing en moins difficile que la torture. ^_^
Crudités = nature writing? Bon, si vous voulez. Car dans le nature writing il y a des animaux chassés ou pêchés...
Quoi ?! Des tortures aussi dans Le fils ? Oh ben je le raye de ma LAL alors (ouf, je n'avais pas cédé à l'achat immédiat pour celui-là !). Quel dommage, mais bon, j'ai eu ma dose torture pour un bon moment là... Tiens, je préfère enchaîner sur un autre nature writing que sur Le fils.^^
SupprimerPour "crudités = nature writing", oui c'était un peu tiré par les cheveux, mais Cryssilda te dira que son nature writing à elle (le dernier David Vann), justement du fait qu'il y ait des animaux chassés et tués, dégoûterait n'importe qui de la viande - donc on reste quand même de la logique "crudités", haha !
Juste un passage, en fait (mais ça me suffit, je suis chochotte)
SupprimerOh mais ça serait le passage de trop aussi pour moi.;-)
SupprimerJ'avais beaucoup aimé son recueil de nouvelles, il faudrait que je prenne le temps de me plonger dans ses romans.
RépondreSupprimerAh oui, si tu aimes déjà l'auteur à travers ses nouvelles, il y a des chances que tu apprécies ses romans.
SupprimerTu sais que c'est précisément à cause de ton bémol que je ne lis pas le Meyer (le Fils) parce que des bonnes âmes m'ont justement dit que les scènes de torture étaient vraiment hard...Mais là ou le Boyden me tente d'avantage c'est que c'est le XVII siècle , qui est une période que j'aime vraiment beaucoup, et qui m'intéresse (roman historique plus aventure généralement je prends). Mais je passe quand même parce que vraiment les scènes de torture, je ne peux pas.
RépondreSupprimerAh si tu as du mal avec les scènes de torture, vraiment je te conseille de passer ton chemin, même si j'y ai survécu.;-) C'est quasi toutes les deux pages qu'il y ait fait allusion, c'est très lourd. Ça commence à être loin tout ça, j'ai pansé mes plaies, j'ai réussi à effacer certains détails dans ma tête, je pourrais presque avoir l'impression que finalement tout cela n'était pas si dramatique, mais j'ai quand même en mémoire, comme marqué au fer rouge, mes crispations à l'idée de ce que j'allais encore devoir endurer à chaque page tournée, ou à l'approche d'un événement propice à une évocation de torture, franchement c'était psychologiquement pénible de ce point de vue là. Tu vois là, le Meyer, pour moi c'est niet niet niet depuis que je sais qu'il y a quelques scènes difficiles.;-) Mais bon, pour le Boyden, si le sujet t'intéresse et te tente, ça vaut le détour quand même.;-)
SupprimerMoi je trouve que notre logique se tient car rien ne me semble plus logique que de clôturer nos Nature Reading autour d'un boooon plat de crudités !! :-)
RépondreSupprimerBon, il va falloir que je lise Boyden un jour, je pense que ça peut carrément me plaire ! (tant qu'on ne torture pas d'animaux, ça me va! mdr)
Aaah miracle, nous pouvons enfin communiquer par blog interposé haha ! Pfiou !
SupprimerOui, moi j'ai trouvé ça très logique dès le départ, c'était comme une évidence.;-) Bon, il ne reste plus qu'à fixer notre date (non pas que je sois pressée^^).
Quant à Boyden, oui, je pense que ça pourrait te plaire, surtout si tu supportes les évocations et descriptions de torture (moi je visualise et ressens trop bien les choses, et cette cruauté humaine me dépasse tellement que ça m'affecte...).
bon, en général j'ai le coeur bien accroché...(même si il fait parfois des virevoltes sur des sujets inattendus) donc j'ai quand ême envie de le lire!
RépondreSupprimerBon, si tu en as vu d'autres, ça devrait bien passer, alors ne te prive pas, surtout si le sujet te parle.:-)
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