FROMAGE
traduit du néerlandais (Belgique) par Xavier Hanotte
Quelles petites merveilles ces classiques de la première moitié du 20è siècle tout de même ! Qu'ils soient français, anglais, italiens, américains, ou même belges (oui, oui), ils ont cette saveur délicate et raffinée d'une autre époque, rehaussée par une écriture élégante et soignée mais naturelle, qui ne sent pas l'effort, et qui vous donne l'impression d'un accès privilégié à un trésor linguistique enfoui. Quel plaisir de lecture que ces phrases bien tournées qui, en deux-trois mots, parviennent à vous évoquer avec force des situations ou des personnages auxquels vous vous identifiez sans peine, que ce soit du vécu ou non, et ce, malgré les décennies qui vous séparent.
Et quand les personnages et les situations prêtent en plus à rire, on se régale doublement, sans indigestion !
Écrit en 1933, ce court roman raconte l'histoire de Frans Laarmans, modeste employé de bureau à Anvers, qui accepte bien malgré lui de devenir le représentant en Belgique d'une entreprise hollandaise de fromage. Trop conciliant et ne sachant pas dire non, sans compter une certaine fierté de se voir confier ce travail et de grimper dans l'échelle sociale, le voilà qui se retrouve avec dix mille fromages en dépôt dans sa cave, qu'il va devoir écouler rapidement auprès des commerçants pour assurer son salaire et justifier son nouveau statut. Mais comment faire quand on est nouveau dans la branche, qu'on n'a pas l'ombre d'une fibre commerciale et qu'il s'agit tout de même de sauver les apparences et conserver sa dignité ?
Aaah mais qu'est-ce que j'ai ri des péripéties de notre pauvre Frans qui n'était pas sans me rappeler le détective privé novice dans J'enquête de Joël Egloff ou les Situations délicates de Serge Joncour. Cela m'amusait beaucoup qu'il trouve toujours des prétextes bidon, comme prendre le temps de bien aménager son bureau ou trouver le bon papier en-tête, pour ne pas passer à l'action. Aaah et cette scène mythique quand il se décide enfin à entrer dans son premier magasin de fromages ! Excellemment rendue ! J'en souffrais pour lui ! Et l'idée d'envoyer toute une armée de représentants aux quatre coins de la Belgique pour négocier à sa place, mais sans les payer. Hahaha ! Sans parler du fait que ces pauvres hères n'étaient souvent pas plus qualifiés que lui pour le job.
J'ai beaucoup aimé la fin aussi qui se termine, étonnamment, tout en tendresse (je n'en dirai pas plus^^).
La quatrième de couv' présente ce récit comme une satire savoureuse du monde des affaires dans laquelle l'auteur, "Willem Elsschot, en maître de l'humour froid, observe avec un mélange de compassion et de férocité les faiblesses du genre humain".
Je suis on ne peut plus d'accord !
Une excellent découverte côté classique belge. Je recommande chaudement !
Et un petit extrait pour la route :
"- Réfléchis-y, me conseilla-t-il. Il y a beaucoup à gagner et tu es l'homme de la situation.
C'était sans doute un peu cavalier de sa part, car à mon avis personne n'avait le droit de voir en moi l'homme de la situation avant que je ne m'y sois vu."
L'auteur
Willem Elsschot, de son vrai nom Alfons-Jozef de Ridder (Anvers, 1882-1960), est un écrivain et poète belge d'expression néerlandaise. Patron d'une agence de publicité, il a déjà publié plusieurs livres hors de toute mode littéraire lorsque paraît en 1933 son roman Kaas (Fromage). Un ouvrage qui lui apporte une reconnaissance aussi importante que durable. Cette figure majeure de la littérature flamande suscite un engouement particulier aux États-Unis.
Hanotte le traducteur? (au fait, et Ours, un jour? ^_^)
RépondreSupprimerSinon, rien à la bibli, mais je viens de terminer un polar belge, ouf, l'honneur est sauf.
Oui, Ours, un jour.^^ Je voulais découvrir d'autres auteurs pour cette année, mais finalement, en lisant sa traduction, c'est un peu comme si j'avais lu Hanotte, non ? En tout cas, la qualité du texte vient probablement aussi de son travail de traduction.
SupprimerHâte de découvrir tes trouvailles belges !
Tu as l'art de trouver des pépites originales ! L'auteur était publicitaire, il s'est sans doute doublement amusé à malmener son "héros". Et Xavier Hanotte... Je suis contente pour toi que tu aies commencé ce mois avec autant de plaisir !
RépondreSupprimerJ'ai eu de la chance sur ce coup-là.^^ J'étais tombée dessus par hasard en librairie l'année dernière et le titre m'avait intriguée de suite. J'avais bien retenu que l'auteur était belge et je n'attendais que ce mois pour le lire enfin !^^ J'étais tellement contente que ce soit une vraie bonne pioche et une très belle surprise.
SupprimerPour l'anecdote, j'ai lu que l'auteur avait fini par détester son boulot de publicitaire !
C'est vrai que la première moitié du 20ème siècle regorge de pépites de ce genre. Dommage que la majorité des éditeurs soit trop frileuse pour se pencher sur leur cas.
RépondreSupprimerOui, dommage que la demande pour ce genre d'ouvrages ne soit pas plus importante. Certaines maisons se risquent tout de même à rééditer de grands succès d'antan mais ces livres ne rentrent quasi jamais dans le top des ventes.
SupprimerVendu !
RépondreSupprimerOuhla, hâte de te lire à ce sujet !!
SupprimerAu départ, ça ne me dit rien, mais quand tu en parles, j'en ai subitement envie... Quelle tentatrice !
RépondreSupprimerHein ? Pour une fois que j'arrive à te tenter !;-)
SupprimerDécris comme ça on dirait un peu du René Fallet , si je le trouve je le prendrais .
RépondreSupprimerJe n'ai jamais lu René Fallet, du coup je note !:-)
Supprimertrès très très très très très tentée :))) Et je ne connaissais absolument pas!!
RépondreSupprimerJe suis tombée dessus complètement par hasard. Je ne connaissais pas non plus et je ne regrette pas la découverte !
SupprimerBonjour A_girl, je ne connais pas mais rien que la couverture, la lecture est tentante. Bonne journée.
RépondreSupprimerBonsoir Dasola, c'est la couverture aussi qui m'avait attirée au départ (et un peu le titre assez inattendu^^).
SupprimerIl va falloir que je regarde cela du côté de ma bibliothèque !
RépondreSupprimerFranchement ça vaut le détour.;-)
Supprimer