BANANA GIRL
Quand Cryssilda m'a offert cet album pour mon anniversaire, convaincue que ça devrait me plaire, j'étais plutôt sceptique au départ (quel titre quand même, non ?), mais un coup d'oeil plus attentif au sous-titre m'a vite rassurée : "Jaune à l'extérieur, blanche à l'intérieur". Aha !
Kei Lam, l'auteure, née à Hong Kong, raconte son enfance alors qu'elle s'installe à Paris avec ses parents en 1991, à l'âge de 6 ans. Kei grandit donc en France, partagée entre deux cultures. Effectivement, tout à a fait le genre de thématiques qui me parle, la biculturalité, le choc des cultures, d'autant plus que je n'ai jamais lu de témoignages de ce genre côté chinois. Et quand ça concerne les Chinois en plus, on croit connaître, on pense déjà tout savoir, ou pire, on ne se pose pas vraiment la question tellement ils semblent facilement intégrés, mais en fait, c'est un univers plus fascinant et touchant qu'il n'y paraît qu'on découvre. Du moins à travers l'histoire de Kei.
Partagée entre son héritage culturel et l'apprentissage du français, l'intégration à l'école, la découverte du mode de vie français, Kei se forge petit à petit son identité et nous raconte, par le biais d'épisodes courts (très appréciables, ça) et sur un ton badin et mâtiné d'humour (toujours un bonus plus dans ce genre d'album), ses chocs et émerveillements à son arrivée, son adaptation progressive et la façon dont ses parents ont maintenu la culture et les traditions chinoises au sein de leur famille.
Dans cet album, j'ai particulièrement aimé tout ce qui avait trait aux réflexions autour de la langue, tels ces extraits :
"La chambre de bonne où logeait mon père appartenait à un couple de Français avec deux enfants. [...] Mais pour deux familles qui ne parlent pas la même langue, la situation devient vite compliquée...
Enfin, si, ils parlent tous français !
Juste pas le même...
Il y a celui de Carole et Gérard, niveau avancé, celui de mon père, niveau "basique avec accent chinois", et celui de ma mère, niveau "un sourire vaut mieux que deux tu l'auras"."
"Tandis que mon niveau de français s'améliorait, celui de mes parents n'était toujours pas au point. [...]
Je leur avais écrit dans ma lettre "vous me manquez" mais ils ont compris que je manquais d'argent... [...]
Mes parents vivaient dans une permanente incompréhension liée à la langue et à la culture. Ils semblaient s'y être habitués."
Parfaitement intégrée au fil des années, elle n'en oublie pas pour autant ses premières années à Hong Kong dont elle évoquera quelques souvenirs. Cet album a été aussi l'occasion pour elle d'enquêter sur la vie de ses parents lorsqu'ils étaient en Chine, période sur laquelle ils ne se sont jamais épanchés auprès d'elle, et on le comprend quand on découvre qu'ils ont vécu la Révolution culturelle.
Mon avis Goodreads (4/5 étoiles)
"Aaah je ne suis pas loin du 5 étoiles. Beaucoup plus conquise que je ne m'y attendais et pourtant, il n'y avait pas grand risque au vu du sujet et de tout ce que ça impliquait culturellement. Mais un peu comme avec les carnets de voyage, il faut du talent pour raconter sa vie et celle de sa famille, sinon, tout peut paraître bien plat, et ici, ce n'est vraiment pas le cas. Le talent et la finesse sont bien au rendez-vous !"
Ce que j'ai trouvé touchant, voire bouleversant dans ce témoignage, c'est de voir comment l'enfant a réussi a parfaitement s'adapter et s'intégrer dans son nouvel environnement tout en gardant son héritage culturel, alors que ses parents, malgré tous leurs efforts et leur bonne volonté, n'auront jamais pu complètement adopter cette nouvelle culture et sont en quelque sorte des déracinés à vie.
J'ai beaucoup aimé aussi le graphisme qui paraît un peu simpliste au premier abord mais qui est vivant, expressif et bien net, avec quelques pages de couleur qui rythme le tout comme un souffle, une parenthèse, un entracte dans le récit en cours.
Beaucoup de belles réflexions aussi jalonnent le récit :
"Mais il faut croire que mes parents étaient plus aventuriers à l'époque que moi aujourd'hui.
Ma mère m'a expliqué que mon père avait des rêves tellement grands qu'il était facile de s'y accrocher..."
L'auteure
Kei Lam est née à Hong Kong en 1985. Diplômée de l'École des ingénieurs de la Ville de Paris, elle séjourne quelques mois en Chine avant de rentrer en France où elle travaille plusieurs années dans un bureau d'études spécialisé en aménagement urbain. En 2015, elle intègre l'École de Condé à Paris pour suivre des études d'illustration. Elle travaille depuis pour la publicité et la presse. Banana Girl est son premier roman graphique.
Ouh ce livre est pour moi, là!!! En dépit de solides racines berrichonnes depuis des siècles (mâtinées d'un rien de solognot, tu vois le mélange ^_^), le bi culturalisme m'intéresse et me fascine. Surtout avec humour. Surtout que j'ai droit tous les samedis à des tâtonnements linguistiques (dernièrement, expliquer que 'pipi' ne s'utilise plus trop après un certain âge)
RépondreSupprimerAh oui tu pourrais écrire un livre toi aussi avec tes activités du samedi ! Oui, ça reste un thème fascinant et très intéressant quelles que soient les cultures en fin de compte, et quel que soit notre propre background culturel.
SupprimerSujet de BD toujours intéressant et enrichissant... Si je la trouve à la bib' !
RépondreSupprimerJe recommande chaudement ! Je pense que tu sauras apprécier.:-)
SupprimerLes enfants ont une étonnante capacité d'adaptation...
RépondreSupprimerC'est vrai, ils ont cette chance, même si ce n'est pas toujours évident.
SupprimerJe me demande pourquoi ta news arrive dans les spams maintenant ! Il faut que je pense à aller voir là !
RépondreSupprimerJoli titre et jolie couverture.
Bon après-midi.
Aaah blogger et les spams...
SupprimerOui, joli titre, jolie couverture et jolie histoire.
Bon weekend.
Inconnu au bataillon mais il faut reconnaître que tu donnes très très envie de remédier à cela au plus vite !
RépondreSupprimerCette BD n'a pas vraiment trouvé son public j'ai l'impression. Bien dommage parce que cette auteure a beaucoup de talent. Bon, il faut dire que c'est une thématique qui ne parle pas forcément à tous. Très curieuse de ton avis si tu la lis en tout cas.
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