L'ANOMALIE
"Il est une chose admirable qui surpasse toujours la connaissance, l'intelligence, et même le génie, c'est l'incompréhension."
Bam ! Tout est dit !^^ C'est la première phrase de la quatrième de couv, extraite de ce roman, et je n'aurais jamais pensé qu'elle prendrait sens ni résonnerait si fort en moi une fois la dernière page tournée.
Parce que ce livre m'a fait réaliser une chose : l'incompréhension est parfois plus fascinante que le sens ou l'explication sans faille, et l'intérêt n'est pas forcément dans la réponse mais dans les questions. C'est un peu ce que nous traversons dans cette grande aventure qu'est la vie d'ailleurs, non ?
Après avoir erré quelque temps en quête de ligne directrice (ah bon, ce n'est pas une histoire de serial killer finalement ?? Ni un roman psychologique ? Ah ! L'histoire d'un écrivain peut-être ? Wrong again !), de sens (mais que s'est-il passé à bord de ce vol, bon sang ??), d'explications (et là j'en exigeais vraiment de la part de l'auteur, Hervé Le Tellier, car un mystère de cette ampleur au coeur de l'intrigue, créé comme un teasing, ne pouvait demeurer inexpliqué), j'ai fini par réaliser que l'intérêt (le très grand intérêt) de ce roman résidait ailleurs (la vérité est ailleurs, on le sait pourtant - tutulutulutu - air connu #XFiles).
Et cette phrase que je cite au début a finalement été ma réponse, pleinement satisfaisante, à ma quête de sens dans ce livre. Quel tour de force de la part de l'auteur, me suis-je dit alors !
Aah ce livre...
C'est le genre de livre dont on peut difficilement, je trouve, parler par écrit, qu'il faudrait juste lire, et ensuite on en discute de vive voix avec, idéalement, des personnes qui l'auraient lu :
- d'abord parce qu'il est vraiment difficile d'en parler sans rien dévoiler de l'intrigue (certains l'ont tout de même fait, chapeau !), à part tourner autour de ce fameux événement, l'anomalie, dont on ne peut rien dire donc, et c'est drôlement frustrant.
- ensuite parce qu'il y a teeeeellement à en dire (sur la structure narrative, les personnages, les histoires de chacun, l'humour, les réflexions existentielles suscitées, j'en passe et des meilleures (mais vraiment des meilleures)) qu'on ne saurait se résoudre à le résumer en quelques lignes.
Les remarques dont je pourrais laisser une trace ici :
- vraiment ravie que ce roman ait remporté le Goncourt. Ça change vraiment dans le paysage de ce prix qui nous a habitués à plus académique, prévisible, lisse et élitiste. Ça rafraîchit un peu le label et c'est une bonne chose.
- ravie aussi qu'il soit traduit en plusieurs langues et très curieuse de sa réception dans ces pays. Ce roman, c'est du lourd, j'en ai presque une fierté de coq. Et il sera adapté en série ! Encore mieux !
J'avais déjà goûté au Joconde jusqu'à cent de Le Tellier il y a bien 15 ans, un recueil de textes humoristiques et parodiques offrant une centaine de points de vue sur le fameux tableau de Léonard de Vinci, et j'étais assez étonnée de le découvrir en romancier ici mais j'ai bien retrouvé l'homme qui s'amuse tout en maîtrisant son sujet, et ça m'a fait plaisir. Alors on n'est pas dans l'exercice de style oulipien du genre, j'écris tout un roman sans la lettre "e", mais ça reste un roman-jeu littéraire surprenant et bluffant dans sa structure, sa charpente, sa mécanique, son mélange des genres, son développement subtil. Rien n'est laissé au hasard, l'auteur sait où il va et il nous y mène dans un style parfaitement accessible et dans un rythme aussi entraînant qu'un thriller, en nous confrontant à des questions démentes (aah si je pouvais en parler !). Un véritable tour de force plus on y pense.
Et j'ai beaucoup aimé la fin que chacun interprétera sûrement à sa manière. Moi j'y ai vu une signature espiègle de l'auteur, sa marque oulipienne, la dernière énigme dont lui seul détient la clé, et un clin d'oeil encore à cette phrase : "Il est une chose admirable qui surpasse toujours la connaissance, l'intelligence, et même le génie, c'est l'incompréhension."
L'auteur
Membre de l'Oulipo, Hervé Le Tellier est l'auteur de plusieurs livres remarqués. Il a reçu en 2013 Le Grand Prix de l'humour noir pour ses Contes liquides.
Hé ben voilà! Parfait billet! Tu as raison, un Goncourt épatant et qui change! (même si certains Goncourt étaient corrects). je me relirais bien cette Joconde, tiens.
RépondreSupprimerMoi c'est ses Contes liquides qui m'intéressent bien.^^
SupprimerOui je suis bien d'accord avec tout ce que tu as écrit.
RépondreSupprimerSuper alors !:)
SupprimerJe l'avais noté, et ton billet me conforte. Merci!
RépondreSupprimerTrès curieuse de ton avis si tu le lis !
SupprimerJ'ai appris lors d'une de ses interviews que l'auteur fait partie de l'Oulipo. Ton billet entretient le mystère à souhait... (plus tard, quand il sortira en poche, peut-être ?)
RépondreSupprimerJe mourrais d'envie d'en dire plus mais là ç'aurait été vraiment gâcher le plaisir de la découverte pour celles et ceux qui ne l'auraient pas encore lu.
SupprimerBravo ! Tu en parles très bien !
RépondreSupprimerMerci ! Tu t'en étais bien sortie aussi.:)
SupprimerJ'aimerais beaucoup le lire mais comme il y a une centaine de réservations à la bibliothèque, ce n'est pas pour tout de suite !!!
RépondreSupprimerAh courage, je suis passée par là pour ce livre.;)
SupprimerTout m'attire dans ce que j'entends dire de ce titre : son originalité, son foisonnement, son ton... et alors que dire de ton enthousiasme si communicatif !
RépondreSupprimerJe suis convaincue que tu seras conquise toi aussi. Vraiment hâte de te lire à ce sujet !:)
SupprimerJe ne sais pas si je le lirai, mais on peut dire qu'il faut couler beaucoup d'encre ! Apparemment on adore ou on déteste ! Je lis de tout à son sujet !
RépondreSupprimerAh ça oui, impossible d'échapper à ce phénomène littéraire, à moins de vivre dans une grotte.^^
Supprimerje suis sur la liste d'attente à la bibli, on verra!
RépondreSupprimerJ'espère que l'attente ne sera pas trop longue.
SupprimerEt bien vient donc diner chez moi samedi soir prochain pour qu'on en discute de vive voix ! RDV 20h00 ;)
RépondreSupprimerRavie que tu ai adoré ce livre tout comme moi, et encore plus ravie d'apprendre le projet de série !
Haha, à défaut de pouvoir se déplacer après 18h et voir les amis en vrai, il y a toujours le téléphone.:) C'est ainsi que j'ai pu discuter de ce roman de vive voix et que j'ai réalisé à quel point il était difficile d'en parler de façon satisfaisante autrement.;) (ça vaut pour beaucoup de livres ceci dit).
SupprimerJe pense qu'il faudra encore patienter un moment avant de voir cette série mais je suis ça de près.:)
D'accord, tu confirmes que ce serait se priver que de le manquer. J'y viendrai, j'y viendrai, tu nous accroches bien, là :-)
RépondreSupprimerJe confirme.:) C'est une lecture qu'il faut faire ne serait-ce que pour comprendre ce phénomène dont tout le monde parle (ou ne parle pas^^).
Supprimer