L'HOMME GRIBOUILLÉ

L'HOMME GRIBOUILLÉ

Cet album m'a longtemps intriguée : le titre, la couverture avec ce personnage mystérieux et inquiétant, et surtout l'enthousiasme des lecteurs à sa parution. Autant dire que j'en attendais beaucoup.

Graphiquement et narrativement, j'ai dû me laisser apprivoiser au début, mais ça n'a pas été trop compliqué, les deux étant incontestablement de l'ordre du grandiose même si l'on en doute au début.^^ On voyage dans le noir et blanc avec une dominante de noir, sombre en tout cas, gris, épais et épuré, qui colle parfaitement à l'atmosphère nimbée de mystères du récit - un petit côté Sin City en moins graphique, dans les émotions suscitées, qui ancre vraiment une ambiance mystique, hypnotique en tout cas. J'ai beaucoup aimé le rendu de Paris sous la pluie, l'atmosphère de la ville, ses bâtiments... 

La narration est plutôt soignée. Le récit s'installe progressivement et prend le temps de se développer, sans trop de blabla ni sans se perdre dans les détails non plus. Il s'enchaîne, comme déterminé, vers un but, un peu à la mine de rien, autour du quotidien des personnages, trois femmes, une famille sur trois générations, et puis, goutte à goutte, des notes de fantastique, d'étrange, de mystérieux, de quelque chose qui sort complètement du cadre réaliste, viennent fissurer ce quotidien à première vue ordinaire.

Passé le moment d'adaptation, j'ai été vite prise dans le rythme du récit et captivée par tout le mystère qui plane autour et agit en vrai page-turner. On veut comprendre ce qui se passe, qui est Max Corbeau, l'histoire de Maud... jusqu'à ce que les événements prennent un tournant un peu wtf - déroutant disons.

Je ne m'attendais pas du tout au chemin que prendrait cette intrigue, un brin fantastico-fantasmagorique, et qui m'a laissée franchement perplexe. 

Au bout du compte, je ne suis pas convaincue d'avoir aimé cette histoire trop peu terre à terre peut-être pour moi, avec des liens qui m'ont manqué même si ça ne m'a pas trop dérangée pour la compréhension globale de l'intrigue.

Malgré tout, on ne peut nier que c'est une histoire solide, qui tient la route à sa façon, avec du travail derrière, et même des idées plutôt originales dans le fond, et qu'on accroche ou non à l'intrigue, il n'y a pas grand-chose à redire graphiquement ou narrativement. 

C'est un conte noir où l'on déambule comme sur un fil entre l'horreur et le merveilleux, et l'intrigue nous y maintient en équilibre de manière assez déroutante. Mais pourquoi cette histoire si étrange tout de même ne peut-on s'empêcher de s'interroger ?

J'ai eu des éléments de réponse en fouinant sur le net et en lisant une interview des auteurs. OK, tout a pris sens alors, j'ai compris leur projet, leur ambition, et c'est en effet une réussite si on lit cet album à travers ce prisme, mais je comprends mieux aussi pourquoi je n'y ai pas complètement trouvé mon compte.

Les auteurs

Scénario : Serge Lehman

Illustrations : Frederik Peeters