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jeudi 9 septembre 2021

UN SANDWICH À GINZA


UN SANDWICH À GINZA

illustré par Jirô Taniguchi
traduit du japonais par Myriam Dartois-Ako

Cuisine + Japon, c'est un des combos fatals pour moi. Cryssilda l'a très bien compris puisqu'elle me l'a offert.:) Et puis la mention "illustrée par Taniguchi", c'est un peu un gage de qualité. Je ne pouvais donc que passer un bon moment de lecture, et ça n'a pas raté.^^
Il ne s'agit toutefois pas d'un album standard ou d'un roman graphique, comme pourrait le laisser penser la couverture. Il ne s'agit d'ailleurs pas d'un roman du tout, à ma grande déconvenue au début, car je m'attendais à une intrigue autour de personnages dans le quartier tokyoïte de Ginza, ou à une fiction type Le Gourmet solitaire, que j'avais adoré. Le concept n'en est cependant pas si éloigné car on embarque ici dans un récit de voyage gustatif et culturel à travers le Japon et au fil des saisons, effectué et commenté de manière vivace et enthousiaste par la sociologue et reporter gastronome, Yôko Hiramatsu.

Des petits restaurants de quartier à des enseignes plus luxueuses, en passant par l'auberge du fin fond de la montagne, et même le restaurant d'entreprise, elle nous émerveille tout le long par la diversité des mets de saison et des spécialités locales. Pour n'en citer que quelques-unes (celles de la quatrième de couv), le pot-au-feu de fugu à Osaka, les gyôza croustillants à Jimbôchô, l'anguille de Narita..., la part belle étant faite à la cuisine authentique et réconfortante, pas forcément complexe, voire plutôt simple, mais non moins délicate, préparée avec un soin et une attention extrêmes. Elle a même réussi à me faire saliver à la mention d'un sandwich à la croquette de crevettes roses et à la description d'un sandwich au porc pané (elle m'a moins vendu du rêve avec ses sandwichs aux fruits en revanche 😁). Ah oui, à noter que malgré l'évocation des tempuras de crosses de fougères et de pousses de lis, ce livre ne conviendra probablement pas aux végétariens car elle ne tarit pas d'éloges sur les mets à base de viande, majoritairement présents. Je pense en particulier au chapitre sur l'ours qui, a priori, est délicieux :

"Savoir sa chair si délicatement et joliment disposée doit réjouir l'ours noir d'Asie." [personnellement, j'en doute 😂]
"Hier, l'ours a pénétré mon corps, en même temps que le terroir de Hira. Manger des êtres vivants, c'est pour l'homme une façon de marquer son respect envers la nature, de lui dire sa gratitude, de l'accompagner. Je l'ai profondément ressenti."

Cet extrait est d'ailleurs assez représentatif de l'esprit de ce livre qui, davantage qu'un simple guide gastronomique, nous éclaire aussi sur le rapport des Japonais à la nourriture. J'ai trouvé cet aspect très intéressant culturellement, voire fascinant par moment car leur façon de voir et vivre les choses est parfois si différente de la nôtre.

Ce qui m'a régalée, à défaut de pouvoir profiter réellement de ces plats, c'est le côté très imagé et la quasi-poésie qu'elle met dans la description visuelle et gustative des mets, évoqués avec volupté et un enthousiasme contagieux. Ça me fait le même effet quand j'écoute François-Régis Gaudry commenter, de manière encore plus exquise qu'un excellent critique littéraire le ferait d'un livre, les plats soumis à son palais délicat. D'ailleurs, avant lui, je ne savais pas qu'on pouvait parler autrement d'un plat qu'en disant "c'est délicieux", "hmm, c'est bon", ou "je n'aime pas". ^^

Quelques extraits :
"La conversation s'est éteinte. Le jeune Y. a quasiment les larmes aux yeux : "Ce serait du gâchis de parler. Dès qu'on ouvre la bouche, les arômes s'enfuient." "

"Le jaune, puis le rouge du riz, sur lequel on verse encore du ketchup rouge vif : la cuillère cueille les trois d'un coup pour les porter à la bouche. Le jaune d'oeuf baveux se mêle au riz en une étreinte indicible sur le palais, qui vous laisse pantois ; mais ce n'est pas le moment de céder au trouble. Jetez-vous-y à corps perdu, embrassez la volupté."

Sur le sandwich au porc pané :
"Une généreuse côtelette panée dans le filet, encore brûlante. Une sauce maison un peu épicée. D'épaisses tranches de pain de mie. Je mords dans un morceau du sandwich coupé en petits carrés et la saveur onctueuse de la viande se déploie sur mon palais tandis que le terme "sainte trinité" me traverse l'esprit."

Concernant les illustrations de Taniguchi, personnellement, je n'ai pas trouvé qu'elles aient apporté grand-chose mais il y a malgré tout une petite touche d'originalité à l'associer à cet ouvrage qui intègre ainsi quelques planches dessinées.

L'auteure
Yôko Hiramatsu est née à Okayama en 1958. Diplômée en sociologie, elle écrit des essais culinaires et littéraires. Elle a reçu au Japon le prix des Deux Magots et le prestigieux Kodansha Essay Award.

14 commentaires:

  1. Je suis bon public pour ça aussi. Le gourmet solitaire, très bien. J'ai terminé le visionnage des délices de tokyo, très japonais dans le rythme (rha les cerisiers), une jolie surprise. De la à parler à mes haricots rouges...

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    1. Je ne me souviens pas de la scène des haricots rouges mais étonnamment, je n'ai pas été aussi emballée que la majorité des gens par ce film pourtant bien japonais, comme tu dis. Enfin, j'ai trouvé ça bien, sympa, mais pas aussi enthousiasmant que les critiques le laissaient entendre.

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  2. Oui didonc, cela semble etre un livre allechant....oui tout un combo prometteur...et c'est reussi...;)

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    1. Un livre alléchant et qui tient ses promesses, oui, on pourrait le résumer comme ça.^^

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  3. pas trop tentée pour l'instant, même si je vois qu'il plaît beaucoup... Les histoires sur la nourriture, ne me tente pas trop, enfin pas celle-là.

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    1. Ah oui, moi dès que ça parle nourriture, c'est assez irrésistible, que ce soit japonais ou non.:) J'ai d'ailleurs pas mal de livres autour de la cuisine (hors livres de recettes, s'entend^^) dans ma wishlist.

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  4. Tu lis beaucoup d'auteurs japonais, toi ! Moi, je n'en connais aucun !
    Bonne fin de semaine.

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    1. Ah tiens, c'est flagrant à ce point ?^^ Je me retiens presque d'en lire encore davantage, histoire de varier un peu les plaisirs, mais j'y reviens immanquablement. J'ai toute une liste de romans japonais qui m'attendent dans ma PAL là et j'ai hâte de m'y plonger.;)

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  5. Chez moi aussi ce livre cochait toutes les cases ! J'ai beaucoup aimé ce voyage dans diverses nourritures au Japon.
    Il y a d'ailleurs une série tv japonaise inspirée du Gourmet Solitaire, Kodoku no gurume, et c'est agréable à voir.

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    1. Ouh je serais foutue si je tombais sur cette série ! J'adorerais, c'est sûr, mais c'est tellement frustrant aussi de ne pas pouvoir goûter tous ces mets. J'ai aussi dans ma PAL depuis un moment, Le Club des gourmets et autres cuisines japonaises. Encore un qui coche toutes les cases.:)

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  6. JE LE VEUX!!! J'ai tellement adoré Le Gourmet solitaire, moi aussi.

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  7. Pour l'aspect voyage et découverte, oui. Mais le côté culinaire me laisse le plus souvent sur le bord de la route, que ce soit en réel ou en littérature. Et oui, je ne suis pas fin palais !

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    1. Ah oui, tiens ? Je pensais tout le monde un peu gourmand quand même. D'ailleurs, je ne qualifierais pas vraiment mon palais de fin, plutôt grossier.^^

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