A RISING MAN

( L'ATTAQUE DU CALCUTTA-DARJEELING )

Ça faisait un moment que j'avais repéré cette série d'enquêtes du capitaine Sam Wyndham sur les blogs. J'avais bien noté qu'elle avait un fort capital sympathie. Il y avait un enthousiasme plutôt franc même chez ses lecteurs. Pour moi, le combo polar historique + Inde britannique au début du 20e siècle avait tout pour me séduire, mais (air connu) PAL prioritaire, LAL, autres tentations... le premier tome se faisait toujours passer devant. 

J'ai longtemps hésité aussi à le lire en français plutôt qu'en anglais, la VF étant disponible à la bibli, mais finalement j'ai sorti la CB. Sans regret car l'écriture était vraiment savoureuse, enjouée, pleine d'ironie mordante, avec des dialogues et réparties truculents, et un rien suranné, ce qui collait bien avec le contexte de l'époque et m'immergeait dans l'ambiance, et surtout, je suis tombée sur un passage* qui m'a donné l'occasion d'aller vérifier le rendu en français, et là je me suis dit, les traductions, c'est top, mais que de perdition tout de même ! 

(*celui concernant l'explication du prénom du sergent Surrender-Not (Surendranath) Banergee, devenu Sat (Satyendra) en français).

Bref dès les premières pages, j'ai été sous le charme de l'écriture et je pensais déjà à enchaîner avec le tome suivant !

Pour situer l'intrigue rapidement, Sam Wyndham, ancien inspecteur de Scotland Yard, se retrouve avec une affaire de meurtre sur les bras à peine arrivé à Calcutta. Ce qui agite la police impériale, c'est que la victime est un membre éminent de l'administration coloniale. Dans sa gorge, on a retrouvé une lettre de menace exigeant le départ de tous les Britanniques. Épaulé par le sergent Banerjee, Wyndham va devoir résoudre cette affaire au plus vite.

J'ai bien aimé les personnages principaux, présentés autant avec leurs défauts que leurs qualités, et j'ai apprécié le fait que l'auteur, Abir Mukherjee, donne le temps au lecteur de se familiariser avec eux en s'intéressant, au-delà de l'enquête, à leur vie plus personnelle qui rythme aussi leur quotidien, leur donnant corps et une certaine profondeur psychologique.

J'ai bien aimé découvrir Calcutta avec Wyndham, fraîchement débarqué d'Angleterre. Il m'a rendu la ville très visuelle et tangible (je ressentais bien la chaleur et la moiteur !) et j'ai pris plaisir à suivre ses premières impressions et son adaptation à son nouvel environnement.

J'ai bien aimé comment l'auteur prenait le temps de poser son enquête, les personnages, le contexte de l'époque, sans que cela ne soit jamais ennuyeux. En ce sens, c'est plus un roman d'atmosphère que d'action. L'enquête suit un rythme réaliste. Aucune piste miraculeuse au début d'ailleurs, puis quand ça finit par se décanter, plusieurs pistes se brouillent les unes les autres, compliquant la résolution de l'affaire. Il y avait quelques-unes de ces facilités d'auteur qui, d'habitude, me font hausser le sourcil, mais ici, tout passait bien.

J'ai adoré le sens de l'humour de l'auteur aussi, son ironie piquante, en particulier dans les dialogues. Le sens de la répartie des personnages était savoureux à souhait, et eux-mêmes avaient leur petit caractère très réjouissant.

Enfin, j'ai trouvé ce roman très intéressant d'un point de vue culturel et historique. L'auteur a parfaitement dépeint le racisme ambiant et la façon dont les Anglais traitaient ou considéraient les Indiens, les animosités réciproques, les rapports entre les Indiens eux-mêmes, les enjeux politiques, un aspect que j'ai craint au début d'ailleurs, car ce thème n'est jamais des plus divertissants, mais c'était très fluide ici, au coeur de l'histoire sans être pesant.

L'enquête en elle-même n'est pas des plus décoiffantes. Pas de révélation à tomber par terre à la fin, les raisons du meurtre restent assez basiques. Elle reste toutefois de bonne facture, cohérente, bien menée et développée de façon crédible et réaliste, et finalement, ce n'est pas le plus important de l'intrigue. Elle est presque anecdotique, un prétexte à la mise en scène de cette Inde du début du 20e siècle et de sa société au bord de l'explosion, et ça m'allait très bien ainsi. 

Pas un page-turner donc, mais une lecture plaisante et confortable, pas loin du cosy, dont on accepte le rythme imposé. Je reste prête pour la suite !

Intègre le Défi lecture 2023 (32/40/100) => catégorie 29 (couverture majoritairement jaune)

L'auteur

Abir Mukherjee, né en 1974 à Londres, est un romancier britannique d'origine indienne, auteur de roman policier historique. Il a grandi dans l'ouest de l'Écosse et a travaillé dans la finance pendant vingt ans avant de se mettre à l'écriture.