mardi 23 septembre 2014

C'EST LE CHEMIN QUI COMPTE


C'EST LE CHEMIN QUI COMPTE

Tout à fait le genre de petit livre totalement dans mon créneau, de ceux qui tournent autour des récits de séjour en terre étrangère, surtout dans un contexte auquel on pourrait s'identifier. Un voyageur lambda versus un reporter ou un guide professionnel.
Plus loin et méconnu c'est, mieux c'est ! Et j'ai été servie ici car il s'agit du récit du séjour d'une Française en Syrie. Quelle aubaine ! La Syrie ! Encore jamais explorée en livre (ni en live d'ailleurs), autant dire que ce livre était pour moi ! Loo l'a bien compris quand elle l'a découvert, et n'a pas tardé à me le mettre entre les mains une fois lu (un grand merci donc !).

Ce livre est en fait tiré du blog que tenait Marie Surgers en 2010 pour raconter à ses proches son expérience de séjour d'un semestre à Damas alors qu'elle y suivait des cours d'arabe à la fac. Depuis, les choses s'y sont franchement gâtées comme on sait, aussi on se sent presque privilégié et chanceux de cette incursion dans ce pays à l'époque où "l'idée d'une révolution n'avait aucun sens". On échappe à ce que relaient régulièrement les médias de nos jours pour plonger au coeur d'une culture, d'une autre façon de vivre, savourer le partage d'une expérience peu ordinaire, vivre le choc des cultures et la rencontre de deux civilisations.

C'est avec beaucoup d'humour et une certaine émotion non feinte que Marie Surgers nous livre son expérience, et j'ai particulièrement appréciée ce ton. Dès les premiers jours, elle est plongée dans le bain, et nous avec :

"... je commence à maîtriser le code de la route syrien. Le voici :
- Les deux seuls moments où une voiture a le droit de franchir un carrefour sans ralentir ni regarder nulle part sont 1- au feu vert et 2- au feu rouge.
- pour dépasser un autre véhicule, il faut passer à sa gauche, ou à sa droite, ou pardessus."

                                                                                                                                                   (sur l'usage du klaxon)
"Il y a deux genres, un duel, un pluriel. Irrégulier, le pluriel. Les articles/adjectifs possessifs dépendent du possédé comme en français, ET du possédant comme en anglais. Un verbe doté d'un sujet au pluriel ne se conjugue pas forcément au pluriel. Ça dépend. De quoi ? De la place du sujet, de son nombre et, je le soupçonne, de ce que votre interlocuteur a mangé la veille. Des pervers, j'vous dis."

J'ai beaucoup aimé ce ton dans le récit, teinté de dérision, mais le récit était aussi parfois chargé d'une certaine poésie qui m'a davantage laissée sur le bord par moment (moi et la poésie...). Ces écarts de ton et d'humeur m'ont parfois déstabilisée, voire dérangée, mais l'essentiel était dans cette expérience inédite que j'ai tout de même savourée tout le long.

"Heureuse, oui. Entourée, occupée à n'en plus trouver le temps de rien, je suis malgré tout seule dans un cloître intérieur. Ô combien précieux et déstabilisant. [...] Je suis ouverte, étale. Mes silences sont des chambres d'écho."

Je me suis particulièrement sentie proche de l'auteure aussi dans sa passion pour l'apprentissage des langues. Quel régal de la lire à ce sujet, et ô combien instructif c'était !

"L'arabe greffe ses possessifs sur les prépositions. On ne dit pas : "Je suis près de toi" mais : "Je suis ton près."
J'aimerais savoir quelles autres langues ont choisi cette méthode pour toutes les épouser.
Et puis récemment, on nous a enseigné l'impératif. Rien d'exaltant, je vous l'avoue en confidence, à part un détail irrésistible : ça s'appelle ici "le mode du prince". Mes camarades me trouvent bizarre, avec mon sourire niais qui éclot en pleine leçon de grammaire. Mais que voulez-vous ? Cela m'enchante."

Bien sûr, ce récit m'a également réjouie par ses idées de visite et la description de lieux qui semblent valoir le détour, Mar Moussa en particulier, que j'ai pu admirer sur le net.

Un récit court, "sincère, honnête mais fragmentaire" comme dit l'auteure elle-même. Je l'ai trouvé vraiment court personnellement, c'est riche, intéressant, instructif, malgré tout je suis restée un peu sur ma faim sur je ne saurais préciser quel aspect. Le mot "fragmentaire" convient bien, à tout niveau. 
Entre parenthèses, le format de l'édition est particulier, un format plus petit qu'une carte postale, d'aspect mignon de l'extérieur, mais la typologie en souffre un peu. Mais bon, ceci ne m'a pas empêchée d'apprécier ma lecture.

L'auteure
Marie Surgers est née en 1978. Elle a été maîtresse d'école pour enfants sourds. Elle traduit des livres, notamment ceux d'Ursula Le Guin.
Intègre le   et le 

14 commentaires:

  1. Tu confirmes, dis donc, je voulais le lire, et je l'ai demandé dans ma liste de bibli (le petit cahier rouge), parfois il faut attendre, mais rien ne presse, là ils m'ont réservé un livre dont j'avais demandé l'achat il y a des mois (on va pas se plaindre non plus)
    A propos de Syrie, j'ai découvert samedi dernier lors d'un concert au petit théâtre de Valençay (je suis snob) l'absolument délicieux "Partant pour la Syrie" d'une certaine Hortense de Beauharnais -oui, la fille de Joséphine, interprété par une soprano et un haute-contre qui étaient les premiers à bien s'amuser. Une histoire de chevalier qui part là-bas guerroyer, son amie, etc;.; bref tu vois l'histoire.

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    1. Haha j'adore tes récits escapade théâtre, opéras and co.^^ Ça donne carrément envie de vivre ces expériences folles dis donc !
      Quant au livre de Marie Surgers, tu pourrais voir avec Loo si elle veut bien le faire voyager. Il te plairait bien je pense. Cela dit, ta bib' a l'air de souvent t'écouter même si la commande prend du temps. Il faudrait que je teste un jour auprès des bib' parisiennes tiens ! Jamais rempli leur cahier de suggestion à ce jour ! Mais j'en vois qui griffonnent plein de titres.^^

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    2. Rien encore de prévu (ils ont un budget à tenir, aussi...) D'après le "gentil bibliothécaire" (à qui j'ai donné un fascicule du festival America - genre voici ma LAL), on m'écoute, oui, et je sélectionne donc histoire de garder mon aura...
      Je te donne la suite de mes aventures dans le prochain commentaire. Oui, j'aurais de quoi remplir un autre blog...

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    3. ^_^ Je me vois bien donner ma LAL à une bib' (car il ne faut pas croire, ils n'ont pas tout ce que je cherche à Paris - mais quelques achats perso, ça ne fait pas de mal à l'industrie du livre ;-) ).

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    4. J'achète AUSSI des livres... ^_^

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    5. T'inquiète, je ne te jetterai pas la pierre si ce n'était pas le cas.;-) Je profite énormément du réseau bib' et autres, et quand j'achète, c'est beaucoup d'occase, sauf craquage... (très rare mais ça m'arrive^^).

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  2. Dans ce genre de récit, c'est vraiment le ton qui fait la différence. Si il est trop neutre, il n'y a pour ainsi dire aucun intérêt. Après, dommage que tu l'aies trouvé un peu court.

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    1. Oui, le ton est essentiel, et généralement, on retrouve toujours ce ton plein de dérision, de curiosité, d'ouverture, d'enchantement, de réflexions intéressantes dans ce type de récit. Plus rarement un ton poétique mais c'est un plus du coup pour ceux qui y sont sensibles.;-)

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  3. Moi et la poésie aussi. Mais moi et les langues aussi. Alors, je note. Merci.

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    1. Aaah si toi et les langues aussi, tu fais bien de noter ! Pour un peu, l'auteure me donnait envie d'apprendre l'arabe !^^

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  4. Bien tentée ! De mon côté, la Syrie, je l'ai vécue en live en 2008, bien avant les événements actuels... Les syriens sont tellement gentils. Et pour la circulation, je confirme !!!

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    1. Oui, je me souviens de ton voyage.:-) En 2008, tu chroniquais déjà tes balades dans le monde.:-)
      Ce petit livre te plairait bien, c'est clair !

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  5. Excuse-moi, je n'avais pas vu cette participation. J'ai dû louper ton com.
    Merci et, bien sûr, ta prochaine participation sera acceptée. Je les prends en compte même quelques jours après la date annoncée. Pas de problèmes.
    Bonne fin de weekend.

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    1. Pas de souci. Je suis ravie que mon dernier billet puisse être pris en compte ! Ce tour-ci n'était pas évident, je suis assez contente de mes (maigres) trouvailles.:-D
      Bon début de semaine.

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