mercredi 24 août 2022

UNE SOUPE À LA GRENADE


POMEGRANATE SOUP

( UNE SOUPE À LA GRENADE )

traduit de l'anglais par Santiago Artozqui

Irrésistiblement attirée par la couverture, et par le titre aussi, même si côté cuisine, ce ne sont pas les soupes qui me mettent le plus l'eau à la bouche 😆 (quoique, franchement, d'après sa description dans le livre, ça a l'air d'être un délice), je me suis empressée de noter ce roman quand j'ai vu que ça traitait cette fois de cuisine iranienne (ça change de la cuisine japonaise ou chinoise dont j'ai encore tout un stock de livres dans ma PAL^^).

Le pitch : trois jeunes soeurs iraniennes ouvrent un café-restaurant (salon de thé-restaurant plutôt) en Irlande. Nous sommes en 1986. Elles ont fui la révolution iranienne sept ans plus tôt et, comme la plupart des migrantes, ont eu du mal à trouver leur place et être acceptées. Ce petit village irlandais est une opportunité, et peut-être leur dernière chance de se sentir enfin chez elles. Mais l'accueil n'est pas tout à fait au beau fixe. Leurs petits plats trouveront-ils le coeur (enfin, l'estomac) des Irlandais ?

Je ne sais plus si on parlait déjà de feel-good en 2005, année de publication originale de ce roman, mais en lisant le résumé, c'est ce que je pressentais de l'intrigue. Ça ne m'a pas freinée, et même honnêtement, je me suis lancée précisément en espérant cette ambiance légère, divertissante, cosy.
Bon, eh bien, j'ai été servie, copieusement, en même temps que de baklavas, d'oreilles d'éléphant, de pain lavash, de rouleaux de dolmas (et j'en passe), imaginaires, certes, mais qui m'ont vraiment mis l'eau à la bouche tout le long, et pour avoir testé un excellent restaurant iranien à Paris, je sais que leur cuisine est vraiment savoureuse et raffinée, pleine de nuances dans les saveurs.

Alors bien sûr, tout n'est pas rose dans ce livre. Il y a les méchants habitants, vraiment bêtes et méchants, racistes, odieux, etc, et les gentils, vraiment très gentils, accueillants, ouverts d'esprits, et surtout très gourmands.^^ Tout est un peu caricatural en somme. Une des soeurs, la plus jeune, par exemple, tombe amoureuse, et là on n'est pas loin des clichés bollywoodiens un peu risibles, surtout quand elle "hoquète d'amour" 😆 (je cite dans le texte). 
"Le jeune homme [...], tendant la main vers elle, la captura dans les rets de son regard aux reflets de pierre précieuse."
C'est un poil lisse dans ce sens-là, avec chacun dans son rôle désigné de méchant, de gentil, de victime, mais ça fonctionne assez bien pour peu qu'on se laisse aller, porté par les effluves de la soupe à la grenade et autres délices.^^

Ce qui m'a le plus dérangée, c'est le style, pas désagréable, bien écrit, mais un peu lourd en adjectifs accolés à tous les mots. Tout est décrit avec une abondance de qualificatifs, de métaphores et de comparaisons qui, sur la longueur, finissent par être un peu indigestes, mais bon, une rasade de thé à la lavande et à la menthe, et ça passe.^^
"Layla jeta un coup d'oeil à la rue qui menait au bazar, puis fixa le flot de sang qui coulait encore comme un ruisseau de larmes sur le boulevard recouvert de feuilles mortes. Les empreintes de mains ensanglantées, encore brillantes et fraîches, parsemaient les trottoirs sales [...].
"Des jambes revêtues d'un pantalon masculin foncé étaient étalées sur le lino. Des chevilles osseuses et enfantines, que des touffes sporadiques de poils noirs rendaient plus matures, rejoignaient une paire de bottes militaires vertes maculées de boue."
C'était en tout cas instructif sur la culture iranienne et l'histoire autour de cette sombre période de la montée du régime islamiste, retracée d'après le vécu des trois soeurs. L'auteure, Marsha Mehran, semble avoir eu à coeur d'introduire ces éléments, ses souvenirs personnels et rapportés, qui enrichissent l'intrigue sans que ce soit trop en surface, apportant un peu de sombre et d'épaisseur à cette intrigue autrement indéniablement feel-good.

Une histoire assez prévisible (mais néanmoins une lecture sympathique), qui se déroule comme un conte, avec son lot de petits bonheurs, d'épreuves, de rebondissements, de méchants, mais sans qu'on tremble de trop, sauf peut-être à l'évocation des événements en Iran, qui, eux, sont ancrés dans une réalité tangible.

Une recette introduit chaque chapitre. Alors on aurait envie de s'écrier "youpi !", mais en réalité, vu le nombre d'ingrédients et d'épices nécessaires, de mijotage et compagnie, j'ai abandonné l'idée d'aller régulièrement piocher mes inspirations culinaires dans ce roman.^^

L'auteure
Marsha Mehran est née à Téhéran en 1977, à la veille de la révolution iranienne, qu'elle a fuie avec sa famille qui s'installe en Argentine, puis aux États-Unis et en Australie. Émigrée en Irlande avec son mari, elle a 27 ans lorsque paraît Une soupe à la grenade, qui devait être une série. Seul le deuxième tome est paru, sous le titre Rosewater and Soda Bread en 2008. Elle est retrouvée morte en 2014, dans sa maison en Irlande, dans des circonstances mystérieuses.

16 commentaires:

  1. J'ai forcément démarré ce livre (miam cuisine iranienne) puis abandonné, sans doute l'écriture trop copieuse, dont tu parles. Dommage.

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    1. Oui, des fois on préfère la vraie cuisine du pays que l'écriture.^^

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  2. Oh j'ai vraiment aime....meme le cote mystique ne m'a pas derangee......d'ailleurs c'est le seul livre de l'auteur....on sent dans ce livre ses tiraillements......

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    1. Elle en a écrit un autre, la suite de celui-ci d'ailleurs, mais il n'a pas encore été traduit. C'est peut-être en cours ? Enfin, bon, mieux vaut modérer son optimisme. Celui-ci a mis 15 ans avant d'être traduit en français.^^

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    2. Oh okidou, mais avec le succes de ce premier tome.....

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    3. On peut espérer, oui.:)

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  3. C'est vrai que la couverture est très attirante, mais bon l'habit ne fait pas le moine...
    Je pars une dizaine de jours. A bientôt.

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    1. Bonnes vacances alors ! Je repars quasiment à ton retour, pour une douzaine de jours.^^

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  4. Iran + bouffe, ça avait de quoi me plaire mais tes bémols me refroidissent trop.

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    1. Je crois que j'adore tellement les histoires autour de la cuisine du monde qu'on pourrait me faire avaler n'importe quoi sans que je rechigne de trop.^^

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  5. Je l'ai noté, je n'attendrai pas trop de l'écriture, les abondances d'adjectifs, je vois...

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    1. Voilà, il ne faut pas être trop exigeant. Il faut juste prendre ce roman pour ce qu'il est, du divertissement avec quelques éléments sérieux tout de même.;)

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  6. On me l'a déjà conseillé, et du coup il a rejoint ma PAL. On verra si j'arrive à passer au-delà du style ! (mais je suis un public facile pour tout ce qui touche à la cuisine).

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    1. Pareil, je suis plutôt bon public dès qu'il s'agit de cuisine.^^ Pour dire, le style m'a plus souvent amusée (en mode, allez c'est reparti !^^) qu'énervée.;)

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  7. Le sujet est tentant mais les extraits de style que tu as publié ici me font dire que je serais très vite en indigestion. C'est un style qui m'est insupportable, donc je passe !

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