dimanche 30 mars 2014

L'ÎLE DE TÔKYÔ


L'ÎLE DE TÔKYÔ

traduit du japonais par Claude Martin

Quel livre étrange dont je ne sais trop quoi penser... Je garde un souvenir fort de l'excellent thriller Out de Natsuo Kirino, aussi ce roman qui se déroule sur une île déserte et que j'avais repéré chez Coccinelle m'avait beaucoup intriguée.
C'est en quelque sorte une fable à la Robinson Crusoé revisitée à la japonaise, à ceci près que nous avons une trentaine de naufragés japonais et chinois sur une île déserte, dont une seule femme, Kiyoko, 46 ans, quand débute le récit, 5 ans après le naufrage de cette dernière.

Je l'ai trouvé intéressant sur plusieurs plans et j'ai été agréablement surprise du certain humour que j'y ai trouvé, des personnages un peu barrés que j'y ai croisés, des idées narratives de l'auteure, mais la fin m'a laissée un peu perplexe. Je ne sais pas trop à quoi je m'attendais. Elle n'a rien d'étrange en elle-même, mais elle est à la fois cruelle et drôle, heureuse et malheureuse, ça en est déstabilisant !

Ce que j'ai trouvé intéressant tout le long, en dehors de Kiyoko et de la position particulière qu'elle occupe sur l'île en tant qu'unique femme du groupe, c'est l'organisation des naufragés. La comparaison entre les groupes japonais et chinois qui font bande à part. Les Japonais, dans leur vanité, plus portés sur la culture et l'amusement, et les Chinois, réputés pour leur débrouillardise et leur sens pratique, plus axés sur l'amélioration de leur environnement d'un point de vue fonctionnel (j'ai salivé à la description de mets réalisés à partir de trois rien !!).
Au fur et à mesure du temps passé sur l'île surgissent les meneurs, les exclus, les marginaux. La folie finit par en gagner certains. C'est un récit qui illustre avec justesse les rapports de force dans une société humaine en vase clos, l'adaptation et l'évolution de ces naufragés hantés par ce rêve irréalisable de quitter l'île et rejoindre la civilisation. On souffre presque avec les personnages. La cruauté de leur sort rend parfois mal à l'aise car leur situation est décrite avec beaucoup de réalisme et de façon très crédible. Je n'étais jamais très pressée de les retrouver en réalité.

"Aujourd'hui, ce dont j'ai le plus envie, c'est d'une tranche de pain de mie avec une bonne couche de confiture de fraises. [...] Quelle merveille, la confiture ! A la fois une conserve et un luxe ! Peu importe la qualité, une confiture fabriquée avec une certaine quantité de sucre blanc, c'est déjà la civilisation !"

Il y a également, sur le dernier tiers du récit, une partie délires et hallucinations presque surnaturelles, à laquelle je n'ai pas trop accroché.

J'ai beaucoup apprécié, en revanche, les passages sur le journal de bord d'un des naufragés, Takashi, et ce qu'il représente pour un de ceux qui a réussi à mettre la main dessus :
"L'envie d'ouvrir le journal de Takashi le prenait quand il s'ennuyait de la vie sur l'île. Pour Watanabé, le journal de Takashi était une bible, un livre érotique, un cinéma, une télévision."

Énormément d'atouts dans ce roman qui associe avec finesse comique de situation et tragédie dans une fable originale parfois délirante mais qui m'a étrangement davantage laissée sur le bord que réellement captivée.

Intègre le 

16 commentaires:

  1. Hum, pas sûr que j'adhère. Chinois et japonais ensemble, ça s'est bien passé? ^_^

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    1. Pas si bien.^^ La comparaison des deux communautés est assez amusante et la description de leurs rapports plutôt bien vue. C'est un aspect du récit qui m'a bien plu.

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  2. Est-ce qu'ils mangent le Chinois à la fin ? :-)

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    1. Haha ! ^^ La question est surtout, qu'est-ce qui advient de LA femme à la fin ? Et pendant aussi d'ailleurs.^^

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  3. La couverture fait mal aux yeux ! Et sinon "délires et hallucinations" c'est pas trop mon truc alors je vais m'abstenir (même si je sais bien que ce n'est pas le jour).

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    1. Va en paix, je ne t'en voudrai pas.^^ Et sinon, la couverture n'est pas du tout de cette couleur, plutôt argile rouge sombre, mais je ne sais pas pourquoi, Blogger refuse de me la restituer à l'original et l'a convertie en rouge flashy...

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  4. Moi aussi, j'ai été surprise par ce roman ! Contente que tu l'aies lu et apprécié !

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    1. C'est assez original, c'est vrai, je n'attendais pas l'auteure dans ce registre. C'est plutôt réussi quoique parfois un peu déroutant.

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  5. Je crois que son roman le plus réussi , c'est "Out". Je n'avais pas tellement aimé " Monstrueux", trop long, trop bavard. J'ai lu aussi "Disparitions" intéressant mais assez inégal.
    Les naufragés sur une île déserte est un sujet classique. Un sujet qui me plaît en principe. Une seule femme pour un certain nombre d'hommes, la pauvre je la plains. Heureusement trop âgée pour tomber enceinte, ouf! malgré tes réticences,je vais le feuilleter, il m'intéresse tout de même.

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    1. On n'est pas au bout de nos surprises avec cette femme, je te préviens si la curiosité te prend de lire ce livre.;-) Sujet classique en effet mais abordé de façon plutôt originale ici. Je n'ai lu que "Out" et ce roman de cette auteure, et je restais curieuse du reste de son oeuvre mais ce que tu dis des autres romans ne m'encourage pas trop à poursuivre...
      On verra bien, il y a tant à lire...:-)

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  6. l'histoire me plaît et je n'ai toujours pas lu cet auteur, ça ne saurait tarder...

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    1. J'avais préféré "Out" mais c'est un tout autre genre. Cela dit, si la thématique des naufragés sur une île déserte te plaît, tente plutôt celui-ci en premier, ça se trouve tu sauras davantage apprécier que moi.

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  7. J'ai un a priori plutôt négatif avec les auteurs japonais mais là le thème me tentait bien... jusqu'à ton allusion aux délires et hallucinations. Bon, ça ne sera pas encore pour cette fois.

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    1. Disons que les délires et hallucinations ici ne sont pas incohérents dans le contexte du récit (j'imagine qu'on peut perdre la tête au bout de quelques années sur une île déserte), et c'est plutôt léger, une parenthèse dans l'intrigue, mais si on a du mal avec ça, ça peut rendre la lecture moins agréable, c'est sûr...

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  8. Dommage, le sujet me semblait intéressant.... Mais bon, vu que t'es restée sur les bords de la route...

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    1. Ça se trouve, tu aimerais. Beaucoup de choses intéressantes avec le recul, mais il faut le temps que ça mûrisse en soi, j'ai l'impression.

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