mercredi 4 novembre 2015

IMMORTELLE RANDONNÉE


IMMORTELLE RANDONNÉE

      COMPOSTELLE MALGRÉ MOI

"En partant pour Saint-Jacques, je ne cherchais rien et je l'ai trouvé."
Si je ne devais retenir qu'une phrase de ce récit, ce serait celle-là. Je la trouve tellement percutante, et mystérieuse à la fois. Ce "l" apostrophe désigne-t-il le rien, le néant, ou simplement l'indicible que seule l'expérience du chemin peut matérialiser ? C'est en tout cas un appel à l'aventure, ou la confirmation d'une aventure dont chaque expérience semble propre et unique à celui ou celle qui la vit. Ce chemin, c'est comme être mis face à soi, j'en étais déjà convaincue avant de lire ce récit (en effet, je fantasme sur Compostelle depuis tellement longtemps) mais en lisant Jean-Christophe Rufin, mes intuitions se sont confirmées. Moi aussi Compostelle m'appelle, et il est temps que je me mette en route !

Alors, pour la petite anecdote, je suis loin d'être une grande marcheuse. Dès qu'il est possible de prendre d'une roue à 4 roues, un âne, le métro (même pour une station), le train ou l'avion, on peut être sûr que je ne me servirai pas de mes jambes. Les randonnées, très peu pour moi (surtout de montagne, moi, il faut que ce soit minimum plat). Même une balade en forêt me chagrine. Alors pourquoi cet attrait et cette fascination de longue date pour Compostelle ? C'est très difficile pour moi de l'expliquer (je pourrais jeter en vrac, les paysages, le challenge, l'aventure, le côté mythique de Compostelle, ou même, l'espoir d'une révélation ? Une autre randonnée ne me motive pas autant, pour ne pas dire, du tout). Mais Jean-Christophe Rufin le fait si bien que j'ai adoré son récit de voyage. Enfin, ce qu'il fait si bien, c'est d'expliquer qu'on ne peut pas expliquer cet attrait pour Compostelle, et ça, ça m'a vraiment plu.

"Comment expliquer à ceux qui ne l'ont pas vécu que le Chemin a pour effet sinon pour vertu de faire oublier les raisons qui ont amené à s'y engager ? On est parti, voilà tout."

Bien sûr, je ne suis pas encore partie, mais ce "voilà tout" m'enchante, comme une réponse que je pourrais moi-même donner.

"Quel sens cela a-t-il, au XXIè siècle, de parcourir un tel chemin à pied ? La réponse n'est vraiment pas évidente."

Voilà, on ne peut pas tout expliquer.

Ce qui m'a plu aussi dans ce récit, c'est l'approche de Rufin pour raconter son voyage :
"Mon propos n'a pas pour but de convaincre mais seulement de décrire ce que fut pour moi ce voyage."

J'ai aimé sa façon de voyager, sans a priori, sans préjugés, sans connaissances préalables véritables du chemin, sans savoir vraiment pourquoi ce voyage, avec un regard assez naïf et innocent au début, dans lequel j'ai pu me retrouver.
J'ai aimé ses récits de rencontre, sa façon simple de partager son expérience, avec souvent le petit mot pour rire ou faire sourire.
J'ai aimé sa façon de raconter son voyage, chaque étape, sans toujours partir dans un ordre chronologique, son sens de l'observation, autant des humains que des paysages, dans un style sobre mais délectable, avec des réflexions et des observations savoureuses. C'est, par ailleurs et pour ne rien gâcher, un récit non dénué d'humour et de dérision.
J'ai aimé découvrir comment il a vécu cette expérience. C'était captivant, intéressant, instructif, motivant. J'ai aimé sa franchise, sa lucidité, son humilité, sa façon de décrire comment tout n'était pas rose, en particulier les paysages qui sont loin d'être toujours époustouflants.
J'ai aimé l'homme derrière l'écrivain, il m'a paru intéressant, très intéressant, et très humain.

"Je comprenais combien il était utile de tout perdre, pour retrouver l'essentiel."

Et parce que je me suis plus épanchée à parler de mon propre attrait pour Compostelle que de ce récit qui m'a enchantée de bout en bout, je vais faire quelque chose que je fais de plus en plus rarement, renvoyer à la 4è de couv' qui pour moi résume parfaitement bien ce qu'est ce récit (tout en me mettant en mémo son parcours duquel je m'inspirerais bien !) :

"Galerie de portraits savoureux, divertissement philosophique sur le ton de Diderot, exercice d'autodérision plein d'humour et d'émerveillement, Immortelle randonnée se classe parmi les grands récits de voyages littéraires." 
Jean-Christophe Rufin "a suivi à pied, sur plus de 800 km, le "Chemin du Nord" jusqu'à Saint-Jacques-de-Compostelle." Cet "itinéraire longe les côtes basque et cantabrique puis traverse les montagnes sauvages des Asturies et de Galice."

L'auteur
Jean-Christophe Rufin, médecin, pionnier du mouvement humanitaire, a été ambassadeur de France au Sénégal de 2007 à 2010. Il est l'auteur de romans désormais classiques tels que L'Abyssin, Globalia, Rouge Brésil, prix Goncourt 2001. Il est membre de l'Académie française depuis 2008.

16 commentaires:

  1. Hé bé, enthousiame compréhensible, soit (j'ai ressenti le même) , fascination pour Compostelle, mais quoi, tu n'aimes pas marcher? Moi j'adore, même à Paris. Ah risquer sa vie en traversant, respirer l'air pollué, etc. Je rigole, mais sache qu'une ville se découvre à pied. Oui, même Blois (et là ça grimpe) Alors prépare toi. De même les bestioles s'aperçoivent surtout quand on se balade en campagne (je connais un chemin plat!)

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    1. Haha, bon j'exagère un poil mais disons que je ne suis pas particulièrement fana de marche, à l'inverse de certaines personnes qui pourraient se réjouir des dizaines de km qu'ils auront à parcourir à pied. Non, non, ce n'est vraiment pas mon trip à la base, pas une activité dans laquelle je prends franchement plaisir... Ceci dit, Rome je l'ai fait à pied de long en large et en travers cet été et c'était plutôt agréable. Paris aussi je le fais à pied lors de certaines balades découvertes, mais disons que tout cela, c'est de la balade de flâneur, pas de randonneur. On s'arrête ici et là, on se pose volontiers, on prend son temps quoi.:-)

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    2. C'est aussi ma conception de la balade, t'inquiète. Lever le nez en l'air, prendre son temps, pas vouloir faire à tout prix du 6 km/h ... Cueillir des fruits, des fleurs (ça c'est pour la campagne), découvrir une façade, etc. Puis repos en salon de thé, par exemple.

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    3. Voilàààààà ! ^^

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  2. J'ai beaucoup aimé aussi cette façon de raconter son expérience, avec ce qu'il faut d' (auto)dérision et aussi d'empathie pour ses compagnons de chemin...

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    1. Oui, récit franchement sympathique ! J'ai beaucoup aimé son humilité, sa simplicité et son sens de la dérision. Je me demande si ses compagnons de chemin ont eu l'occasion de le lire, tiens !:-)

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  3. Pas ma came je pense. J'aime bien sortir de ma zone de confort mais là, je ne le sens pas malgré ton avis très positif.

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    1. Pfffrt, mais change de bouclier Jérôme ! Il te fait passer à côté d'expériences de lecture mémorables !;-)

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  4. Je n'ai jamais lu de Ruffin, pourtant je lis beaucoup de bien ce cet auteur.

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    1. Il faut absolument le caser (de force) dans ta PAL ! ;-)

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  5. Je suis hyper tentée par ce livre depuis sa sortie en fait car contrairement à toi, j'adore marcher (enfin d'habitude, bon là moyen), et je sais qu'un jour je prendrai le chemin de Compostelle (comme celui des Douaniers qui est prévu aussi)...et effectivement, j'adore la phrase que tu as mise avec ce "l'" mystérieux.

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    1. Ah oui alors ce livre est complètement pour toi ! C'est fou parce que moi qui ne suis pas une grande marcheuse, dès la sortie de ce livre, j'étais hyper tentée, rien que parce que c'était Compostelle. Ça aurait été un autre chemin, je n'y aurais pas fait attention... C'est comme si je n'assimilais pas Compostelle à une randonnée mais à tout autre chose. Une philosophie peut-être. Je ne sais pas. Enfin, mes pieds me rappelleront à la réalité quand je serai sur la route haha !

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  6. Ce livre pourrait me plaire mais j'en ai tant à lire ...
    Bonne semaine.

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    1. Notre éternel problème...:-) Bonne semaine.

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  7. j'avais bien aimé aussi, découvert en livre audio. L'auteur fait preuve d'humilité et de sincérité.

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    1. Tiens, j'aurais peut-être pu l'apprécier en livre audio celui-là !

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