THE BOTTOMS

( LES MARÉCAGES )

Ça faisait longtemps que je voulais découvrir cet auteur américain, Joe R. Lansdale, mais plus à travers sa série Hap Collins et Leonard Pine dont les titres des tomes, tel Le Mambo des deux ours, étaient plutôt prometteurs. Puis, je ne sais plus où, j'ai cru comprendre que Les Marécages était un de ses romans incontournables. Je m'y suis donc plongée sur la foi de ces recommandations enthousiastes.

L'action se déroule au début des années 30 dans le Texas de l'Est, encore très imprégné des préjugés racistes du Sud des États-Unis. Le Ku Klux Klan domine. Les lynchages demeurent. Lorsque le jeune Harry, 13 ans, et sa soeur tombent sur le cadavre sauvagement mutilé d'une femme noire abandonné dans les marais, cela ébranle à peine leur petite communauté. Il s'agit probablement de l'oeuvre d'un de ces "ambulants", peut-être un règlement de compte entre Noirs. La population blanche ne s'inquiète pas. Leur père, Jacob, représentant local de la loi et féru de justice, entend bien ne pas laisser ce meurtre impuni, mais il n'est pas vraiment aidé et l'enquête piétine. Lorsqu'un deuxième corps est retrouvé, cette fois-ci d'une femme blanche, la tension monte d'un cran dans la petite ville texane. Aaah là il est hors de question que le coupable, sûrement un Noir, s'en tire. Les soupçons se tournent vers un vieil homme noir qui vit dans les marais et que le Klan a dans le viseur.

J'ai beaucoup aimé la voix narrative qui est celle du jeune Harry et j'ai adoré l'ambiance du roman dès les premières pages, celui du Sud des États-Unis, vraiment palpable avec sa chaleur et sa moiteur si typiques. J'étais très flippette dans les bois lorsque Harry et sa soeur s'y sont égarés en pleine nuit au début, l'intrigue prenant une tournure de film d'horreur alors qu'ils y croisent une sorte de créature mi-monstre, mi-humaine qui semble être le meurtrier tout désigné de ces femmes.

L'auteur dépeint vraiment bien aussi le racisme ambiant de l'époque, de façon très convaincante et palpable, glaçante même. J'ai beaucoup aimé les réparties du père de Harry face aux arguments racistes, même si, par moment, il m'a semblé être trop parfait dans son ouverture d'esprit pour être crédible.

Quant à l'enquête, elle suit un rythme réaliste, celui où les choses ne bougent pas forcément vite, mais il n'en reste pas moins soutenu. Si j'ai apprécié ce réalisme au début, vers la moitié du livre, j'ai commencé à ronger un peu mon frein quand même parce qu'entre la chaleur, la moiteur et la lenteur encore plus prononcée, je n'ai dû mon éveil qu'à la perspective de trouver ce fichu meurtrier. Dont j'ai pressenti l'identité avant la fin (que vers la fin heureusement, pas trop tôt dans l'intrigue). Ooops ! Moi qui ne suis pas douée pour cela habituellement, j'étais entre ravie de m'être révélée futée pour une fois et déçue de ne pas avoir vécu la surprise de la fin. Enfin, la révélation fut choc quand même, mais je n'ai pas non plus été complètement satisfaite par les motivations derrière ces meurtres.

Un roman qui n'est pas sans quelques imperfections mais dont j'ai beaucoup apprécié les thématiques raciales de l'époque dans le Sud des États-Unis. Je m'attendais peut-être à plus explosif, à la claque révélation avec cet auteur, mais ça reste un thriller de très bonne facture. 

Je reste très curieuse de la série Hap Collins et Leonard Pine que je tenterai aussi. La question est, par quel tome commencer ?

Beaucoup de lecteurs sur Goodreads ont comparé ce roman à Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur de Harper Lee, ce qui m'a aussi furieusement donné envie de le relire. Ma lecture remonte à bientôt 20 ans et il ne m'en reste que des souvenirs très vagues, pour ne pas avouer, aucun.😅 

Intègre le Défi lecture 2024 (8/30/100) => catégorie 82 (un livre où un personnage parle avec un accent retranscrit - à noter que ceci est valable pour la VO et non pour la VF 😮).

L'auteur

Joe R. Lansdale, né en 1951 au Texas, auteur culte régulièrement primé, a été chercheur d'or, charpentier, plombier, fermier, avant de se consacrer pleinement à l'écriture. On lui doit, avec L'Arbre à bouteilles ou Bad Chili, la série dédiée aux deux indéfectibles potes que sont le Blanc hétéro Hap Collins et le Noir homosexuel Leonard Pine. Les Marécages est un hommage au roman de David Grubb, La Nuit du chasseur.