L'écriture est la passion et la raison d'être de June Hayward. Toute sa vie, elle a rêvé d'être publiée, lue et adulée par des milliers de lecteurs. Mais ses écrits ne convainquent pas vraiment et elle n'est personne, tandis qu'Athena Liu, son "amie", celle avec qui elle a étudié et partagé sa passion de la littérature, connaît une ascension fulgurante dans le milieu depuis sa première publication. Son dernier livre va même être adapté par Netflix !
Un soir où elles célèbrent ensemble son succès, l'invraisemblable se produit. Sa rivale meurt dans un tragique et bête accident. Sans réfléchir, June se saisit du manuscrit qu'Athena vient de terminer et l'emporte avec elle.
À sa lecture, l'inspiration lui vient subitement. Elle le retouche ici et là, réécrit des passages entiers, travaille dur pour lui donner forme, à tel point qu'elle estime maintenant que ce roman est le sien. Elle l'envoie à son agent en le faisant passer pour son propre travail (enfin, de son point de vue, il n'y a aucune ambigüité sur le sujet), et là, tout s'emballe. Les maisons d'édition se le disputent, June signe avec l'une des plus prestigieuses, une campagne marketing de folie s'ensuit, on la pressent dans le top des ventes. Ça ne rate pas, le livre est un succès. À elle la gloire tant attendue, et si méritée !
Oui, mais voilà, très vite, de nombreux lecteurs commencent à suspecter qu'elle n'est pas la véritable autrice de ce roman qui rappelle beaucoup le style d'Athena Liu et remettent en question sa légitimité à écrire sur la culture et l'histoire chinoises en tant qu'écrivaine blanche. June a beau avoir rôdé son discours pour faire face aux critiques, il n'est pas si simple de passer outre la déferlante d'accusations sur les réseaux sociaux. Sans compter que le fantôme d'Athena rôde. Ou est-ce sa mauvaise conscience ?
J'ai bien aimé le style de l'autrice, R. F. Kuang, une écriture contemporaine, vive, fluide, simple et efficace, et je suis rentrée sans peine dans l'histoire dont j'ai trouvé le propos vraiment intéressant et source de moult débats et réflexions.
Très vite se pose la question du plagiat. On doute au début. June a écrit une bonne partie du roman tout de même, mais mon verdict a été assez rapidement radical. C'est une tricheuse dans le déni, qu'on prend un peu en empathie et qui amuse même au début, qui fascine aussi par son culot, mais qui devient assez vite antipathique. Vient ensuite la question de l'appropriation culturelle et du racisme sous-jacent, et plus largement, de qui peut écrire quoi, ou pire, qui doit écrire quoi, et là, j'ai trouvé intéressant le positionnement de R. F. Kuang qui m'a semblé faire preuve de lucidité et d'ouverture d'esprit.
L'idée de l'intrigue m'a beaucoup plu également, offrant une réflexion générale autour de l'écriture et un portrait assez féroce et satirique du monde du livre (auteurs, éditeurs, agents), des médias et des lecteurs, en particulier sur les réseaux sociaux (je ne parle pas de notre petit monde des blogs^^). Tout un univers sur lequel je ne me lasse jamais de lire, mais je dois dire qu'ici, c'était Le Diable s'habille en Prada de l'édition ! Ça avait quelque chose d'assez jubilatoire, cela dit.^^
Mon petit bémol réside dans la tournure qu'ont pris les événements vers le dernier quart du livre. Ça commençait à être un peu tiré par les cheveux et ce n'était pas vraiment le développement que j'attendais, mais la fin m'a satisfaite tout de même.
J'ai réalisé en cours de lecture que R. F. Kuang, 29 ans aujourd'hui, avait 22-24 ans lors de ses premiers succès littéraires et ses livres suivants ont toujours eu bonne presse. Impressionnant !
J'ai vraiment très envie de lire Babel maintenant ! Une LC est d'ailleurs prévue en janvier si jamais.^^
LC avec Sunalee.
L'autrice
Rebecca F. Kuang, plus connue sous le nom de R. F. Kuang, née en 1996 à Canton en Chine, est une autrice sino-américaine de fantasy et de fiction contemporaine. Elle a émigré avec ses parents aux États-Unis à l'âge de quatre ans et a grandi à Dallas, Texas. Elle est notamment l'autrice de la trilogie La Guerre du pavot et du roman Babel, multiprimé.
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