dimanche 22 juin 2008

PASSEPORT À L'IRANIENNE


PASSEPORT À L'IRANIENNE

Un avis assez mitigé sur ce livre où l'auteur dépeint son pays d'origine avec ce qui semblerait être de l'humour et de la tendresse, mais d'où ressort parfois comme un petit ras-le-bol ou un certain agacement vis-à-vis des Iraniens, rehaussé d'une certaine distanciation par rapport à leur mentalité.

Pour le ras-le-bol, on ne lui en voudra pas, c'est le sentiment général que semblent éprouver tous les Iraniens face à un régime dictatorial qu'ils fuiraient tous bien volontiers.

Pour la distanciation, il peut s'agir d'une erreur d'interprétation de ma part, mais si j'ai bien précisé "son pays d'origine", c'est qu'on a quand même le sentiment fort que Nahal Tajadod observe les Iraniens comme de l'extérieur, avec l'oeil de l'occidentale fraîchement débarquée qui hallucine face aux moeurs quelque peu déstabilisantes de tout un pays (tout en les trouvant touchantes par moments) et qui n'a qu'une hâte, rentrer bien vite en Europe pour retrouver son confort et ses escarpins Prada.
Et puis, ce n'est pas n'importe laquelle des Occidentales, hein, c'est la femme de Jean-Claude Carrière, ça, si on n'a pas fini par le comprendre à la fin du livre, c'est qu'on aura fait de nombreux black-outs en cours de lecture. Son lectorat occidental (surtout de la haute) s'y retrouvera sûrement et rira de toutes ses péripéties dans ce pays de fous, mais moi qui pensais que j'allais bénéficier d'un regard neutre, quoique connaisseur, sur l'Iran, qui ne m'attendais pas à avoir une vision de l'Iran au travers de ce prisme-là, j'ai été un peu déroutée, surprise par cette approche.

Enfin, ce qui est appréciable c'est qu'elle l'assume pleinement, son statut de femme issue de la bourgeoisie iranienne qui a réussi à intégrer la jet-set cannoise grâce à son mari (NB: mon portrait est un peu réducteur, je le concède), et son récit n'en est pas moins intéressant et instructif sur les Iraniens, leur culture, leurs traditions, leur histoire, leurs moeurs... 
Après tout, connaître et aimer un pays, et avoir le droit d'en parler, ne nécessitent pas forcément qu'on vienne de ses souches les plus populaires ou les plus humbles...

On s'attache à ces personnages hauts en couleur, on sourit beaucoup de ses mésaventures, on rigole même tellement certaines situations sont rocambolesques, dont celles entraînées par le rituel du târof (excellent la façon dont elle décrit ces scènes!), et surtout celles tout simplement induites par l'application de l'Islam dans la vie de tous les jours. Une scène qui m'a fait hurler de rire, c'est quand elle devait visionner des chaînes porno avec un réparateur de télé (à la demande de ce dernier!) pour être sûre qu'il verrouillait bien les chaînes porno et pas d'autres...

On en arrive à des situations extrêmes et tirées par les cheveux, qui, telles qu'elle les raconte font vraiment rire (on se demande souvent quelle est la part d'exagération dans tout ça), mais la seule pensée qu'il puisse s'agir de la réalité et non d'une farce ou d'une gentille anecdote destinée à amuser la galerie fait frémir. On est content d'être ailleurs quand on sait que, pour du "maquillage voyant, des chevilles apparentes, des cheveux perceptibles, une haleine alcoolisée", on encourt amendes et coups de fouet....

Extrait:
"Quelquefois une simple photo en bikini prise au bord d'une piscine, l'étreinte d'un ami dans le quartier des antiquaires, un fou rire à la Maison des artistes, un chewing-gum trop gonflé dans un bus, un parapluie rouge ouvert par un jour de pluie, un bonbon avalé pendant le mois du ramadan, la visite de deux nâ mahrams (des hommes ne faisant pas partie de la famille) à l'heure du thé, peuvent être interprétés comme des actes subversifs, mettant en danger la stabilité du régime et l'assise même de l'islam."

Mais qu'est-ce que je suis contente de ne pas être née là-bas !!

Bref une lecture divertissante, un brin instructif, un poil drôle, un rien touchant, peut-être une bonne lecture d'été en bord de mer, doigts de pied en éventail, qui nous permet d'aller à la rencontre d'une autre culture (Bienvenue chez les ch'ti-raniens...).

L'auteure
Nahal Tajadod est née en Iran. Elle descend d'une famille liée à l'histoire de son pays. Elle vient vivre à Paris en 1977, étudie le chinois et travaille sur les relations entre l'Iran et la Chine. Elle a publié en 2005 Roumi le brûlis, une superbe biographie romancée du grand poète persan.

2 commentaires:

  1. j'ai lu ce livre et il m'a beaucoup plu par sa truculence , drôlerie.

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    Réponses
    1. Ça pour être drôle, il l'est! :) Des situations abracadabrantes à la pelle, des personnages fantasques... non c'est clair, c'est divertissant à souhait.

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