mardi 15 mars 2022

LE TYRAN MEURT AU QUATRIÈME COUP

 
MATEN AL LÉON

( LE TYRAN MEURT AU QUATRIÈME COUP )

traduit de l'espagnol (Mexique) par François Minaudier

Nous sommes en 1926. Sur Arepa, île imaginaire des Caraïbes, le maréchal Belaunzarán règne en tyran depuis quatre mandats successifs. Les bourgeois du parti modéré comptent sur leur candidat pour mettre fin à cette dictature mais quelques jours avant les élections, le corps de ce dernier est retrouvé dans la mer par des pêcheurs. Qui est derrière ce crime ? Personne n'en doute mais par peur des représailles, tout le monde préfère faire l'autruche. Les derniers espoirs se portent alors sur Pepe Cussirat, un richissime jeune premier qui finit par réaliser qu'à moins d'assassiner le dictateur, il n'y a aucune chance de remporter la victoire. Il enchaîne alors les tentatives qui, non seulement se révèlent infructueuses, mais causent à chaque fois des désastres autour de lui. Arrivera-t-on à "tuer le lion" ?

Ça a l'air très sérieux comme ça, limite plombant, mais du tout ! D'ailleurs, si je me suis risquée dans ce livre, c'est que la quatrième de couv annonçait une "trame satirique et rocambolesque [...] aux accents d'un album des Pieds Nickelés ou du Django Unchained de Tarantino."
La comparaison est un peu poussée mais elle donne quand même bien l'esprit de ce roman court qui est plus dans la veine de la fable et de la farce que de la sombre intrigue politique désespérante. 

Dès les premières pages, j'ai adoré le style et le ton, plein d'ironie mordante, de malice et d'humour noir, dont je me suis régalée jusqu'à la dernière page. L'auteur, Jorge Ibargüengoitia, a une écriture très précise, carrée, qui va a l'essentiel, sans fioriture ni un pet de gras en trop, mais riche malgré tout, très imagée, rythmée, savoureuse, et diablement efficace. Les scènes s'enchaînent sans temps mort comme des plans séquences et on a un peu l'impression grisante d'être aux premières loges d'une pièce de théâtre tragi-comique. Les personnages, hauts en couleur, sont souvent tournés en ridicule, les situations toujours cocasses même au coeur de la tragédie, la hyène hilare était au rendez-vous (l'épisode de la piqûre, j'en pleure encore !). L'auteur parvient à faire rire du pire sans en occulter l'horreur ou la gravité et c'est la grande force de ce roman.
Car sous le vernis de la farce transparaît une société où la dictature n'est pas le seul mal qui ronge le pays. Pendant que les riches bourgeois s'agitent pour sauver leurs droits et avoir leur part du pouvoir, le petit peuple, lui, composé des moins fortunés, des Noirs et des Indiens, est méprisé, oublié et ignoré de tous. Ce sera pourtant peut-être l'un d'eux qui aura le rôle le plus important de l'histoire.

J'ai vraiment adoré cette fable pleine de finesse et de subtilité qui m'a franchement beaucoup amusée, et au vu de la thématique, ce n'était pourtant pas gagné.
J'aurais cependant aimé une fin plus... utopique, peut-être. J'ai eu quelques espoirs dans le déroulement de l'intrigue sur les dernières pages, mais bon, le choix de l'auteur la rend tragiquement réaliste (et toujours aussi rocambolesque), ce qui n'est pas plus mal finalement.

Une excellente surprise côté Mexique ! Ma première vraie belle découverte "auteur" depuis le début de ce book trip et un auteur que je relirais donc bien volontiers !

LC avec Rachel.
Lu dans le cadre du
🌶 Book Trip Mexicain => 4 points (LC + thème classique + 160 pages)
     Total à date => 18 points

L'auteur
Jorge Ibargüengoitia (Guanajuato, Mexique, 1928 - Madrid, 1983) est un écrivain mexicain, dramaturge, essayiste, nouvelliste et romancier.

18 commentaires:

  1. Je l'ai repéré chez Rachel ! C'est noté :-) J'essaie de le lire dès que je peux :-)

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    1. Ça vaut vraiment le détour, et il est assez court.;)

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  2. Mais où allez vous chercher des pépites pareilles?
    Le Wells, ah oui, attends un peu ma réponse là j'ai si peu dormi que je n'arrive plus à rien.

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    1. Je l'avais repéré par hasard (enfin, en fouinant au rayon mexicain^^) chez Gibert, d'occase. J'ai sauté dessus.:)
      Et pas de souci pour Wells. Je l'ai lu mais le billet est loin d'être écrit encore (mais ça devrait être rapide ;)).

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    2. Le jeudi 31 mars? Avant je termine le mois de l'est, cette année j'ai bien participé! (y compris la fameuse combe!)

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    3. Allez, go pour le 31 mars !:)
      Aaah la combe, sympa hein ?^^

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  3. Oh oui on est d'accord.....c'est vrai le cote piece de theatre aussi...;)....

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    1. Oui, la description de chaque scène, des personnages, et puis leurs dialogues aussi, ça a un côté très théâtre.:)

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  4. Non mais ce titre ! :). Franchement accrocheuse et tentatrice cette chronique, ton enthousiasme est communicatif. Je ne suis pas étonnée que ce soit une publication des éditions du Tripode, il y a des pépites dans leur catalogue.

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    1. Oui, en effet, le Tripode est gage de qualité. Ça m'avait rassurée aussi quand j'ai vu leur nom sur la couverture et je n'ai pas été déçue (on n'est jamais à l'abri...).:)

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  5. Je suis contente que tu aies découvert cette pépite ! Je ne note pas grand chose en ce moment, j'essaye de faire baisser ma PAL, mais ça pourrait me plaire !

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    1. Je te comprends, je note le moins possible aussi, ou je note mais pour un jour très indéterminé.^^ Bon, résultat, j'ai une liste à lire longue comme le bras, même si je réussis à préserver ma PAL ainsi...

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  6. Les mots "satirique" et "rocambolesque" me font fortement hésiter...

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    1. Ah oui, on est très différent là-dessus. Moi ce sont des mots qui m'attirent irrésistiblement.:)

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  7. bien tentant, et quelque part, ça rappelle un peu l'actualité !

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    1. Oui, les dictateurs se ressemblent tous un peu.;) On pourrait presque dire que ce roman est un peu caricatural, mais même pas... à peine, quoi !:)

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  8. Ton enthousiasme me donne envie de le lire !

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