C'EST DU FRANÇAIS MAL PRONONCÉ
Ce titre ! Son sous-titre ! Un petit air de provocation. Une mauvaise foi assumée. Mon sang de linguiste amatrice n'a fait qu'un tour... Il me le fallait !
En même temps, l'auteur, Bernard Cerquiglini, dont j'avais déjà apprécié l'indispensable Le La ministre est enceinte (ou la grande querelle de la féminisation des mots), cite Alexandre Dumas (auteur chouchou) dans son sous-titre (phrase attribuée à D'Artagnan en séjour à Londres dans Vingt ans après. Je l'avais même sélectionnée dans mes extraits^^). Pas étonnant que cette phrase ait résonné en moi.^^
L'auteur se délecte dans sa démonstration, et nous avec, mais attention, ce n'est pas que de la provoc. Du tout, même. C'est très sérieux tout ça.
"La langue anglaise est un vaste musée de la langue française", du vieux normand même, plus précisément, et ce livre propose "d'en visiter toutes les collections". Il n'en faudra pas beaucoup pour qu'on finisse par être convaincu que "la langue anglaise est (bel et bien) un français régional". Eh oui !
Bien sûr, on passe par l'histoire de la langue anglaise et donc un peu de l'Angleterre, pas trop dans le détail quand même (c'est passionnant, cela dit), le livre est relativement court, mais c'est assez pour dresser un tableau assez complet du sujet. En revanche, les détails sont dans les mots choisis comme exemples, l'auteur prenant grand soin de développer leur étymologie pour illustrer ses propos. C'est super intéressant, mais l'auteur nous dresse une liste telle que, par moment, on a l'impression de se retrouver dans un dictionnaire ! 😅
Je passe sur les détails expliquant le quand, le pourquoi et le comment de l'intégration du français dans l'anglais. L'auteur le fait très bien, de façon vivante, savoureuse et accessible, c'est absolument passionnant, donc autant le lire pour cela. Pour contextualiser l'argumentation de l'auteur, retenons tout de même que jusqu'au 11e siècle, les Anglais parlaient le vieil anglais (origines germaniques), puis Guillaume le Conquérant (duc de Normandie) a conquis l'Angleterre en 1066 et le vieux normand (langue romane) a ainsi colonisé la langue anglaise. Voilà dans les grandes lignes. Mais que de conséquences ! Jusqu'à de nos jours ! C'était très intéressant aussi de voir à quel point le vieux normand différait déjà du vieux français, ce qui explique aussi que le côté français de l'anglais ne nous saute pas toujours immédiatement aux yeux.
Je voulais au départ mettre quelques exemples des mots anglais d'origine française ou influencés par le français (ou vieux normand principalement donc), mais mon livre est hérissé de post-its.😆 Ça concerne une infinité de mots, dans des champs lexicaux les plus variés, des mots dont la morphologie et la prononciation ont clairement subi l'influence française, des mots qu'on n'aurait pas soupçonnés avoir quelque racine française, comme "challenge" ou même "spoiler" !
C'était très intéressant aussi de voir comment le sens de certains mots a évolué ou a été abandonné avec le temps, suivant qu'il s'agisse du français insulaire ou du continent.
Les langues ne cessent d'évoluer et il y a toujours eu un va-et-vient anglais/français. À partir de 1945, c'est surtout le français qui pompe sur l'anglais, mais malgré tout, ce faisant, il pompe en fait des mots d'origine vieux français, ou vieux normand plutôt, un peu façon retour à l'envoyeur, ironie de l'histoire. Bien sûr, les mots ayant souvent évolué autant en sens qu'en forme, ça passe totalement inaperçu que c'était français à la base, mais cocorico tout de même. Enfin, cocorico, oui, mais comme ces mots sont quasi défigurés et naturalisés anglais depuis moult temps, on préfère maintenant prendre exemple, voire copier sur les Québécois avec des mots tels "divulgâcher" qui sonne quand même davantage bon vieux français d'aujourd'hui.^^ Ou se réapproprier notre langue, en quelque sorte. Ce que l'auteur, après s'être bien amusé de sa démonstration, encourage fortement.😊
Je le note autant pour moi que pour mon père qui râle beaucoup devant tous les anglicismes qui ne le sont finalement pas tant que ça :) Le sujet est dans tous les cas passionnant !
RépondreSupprimerC'est exactement l'esprit. On croit que ce sont des anglicismes alors que c'est du vieux français régional qui a juste un peu évolué avec le temps.😆
Supprimer"Vieux normand" je dresse l'oreille, c'est chez moi ça ! Il a l'air passionnant ce bouquin, je crois avoir entendu l'auteur à la radio sur d'autres écrits. Je note.
RépondreSupprimerAh mais tu dois être assez à l'aise avec l'anglais alors.;) Oui, on trouve aussi quelques vidéos de l'auteur sur le net.
SupprimerAh ça, oui, j'ai tout de suite pensé que le titre était rudement provocateur ! Mais bon, les langues évoluent et se nourrissent les unes des autres. Et puis, il y a la longue histoire commune anglo-française que tu mentionnes. Cela explique certaines choses. Il a quand fallu attendre George III pour que les souverains britanniques renoncent au titre de roi de France, par exemple ! Bon, je m'éloigne un peu de notre sujet là... Ce livre a de quoi éveiller la curiosité et susciter des discussions...
RépondreSupprimerAh oui, les Anglais et les Français, c'est une longue histoire commune en effet.:) Et que de répercussions sur la langue anglaise en particulier. C'est clair qu'il y a de quoi discuter autour de ce livre. Je suis bien contente d'avoir réussi à me contenir un peu dans mon billet d'ailleurs, sinon il aurait pu faire 20 paragraphes au moins.^^
SupprimerBonjour Fanja! Il faudra que je trouve ce livre, apparemment fort intéressant, un de ces quatre matins: j'avais déjà lu quelque part que l'anglais, c'est plus de 80% de français... Merci pour le partage!
RépondreSupprimerBonjour Daniel, oui, c'est assez impressionnant de se rendre compte à quel point le français a influencé l'anglais. Ce chiffre de 80% ne me paraît pas aberrant après avoir lu ce livre, tant les exemples de mots, du quotidien en plus, étaient nombreux.
SupprimerAh mais il me le faut, c'est totalement ce que j'aime (j'ai un rayon 'langues' sur mes étagères), bien sûr que les anglais nous ont piqué des mots, flirter-fleureter, tennis, et remembrance, hein?
RépondreSupprimerS'il n'y avait que ceux-là.^^ Il y aussi aunt/tante, foreign (issu de l'ancien français "forain"), proud (ancien français "prod" au sens "vaillant" à l'époque), fork (ancien normand "fourke", variante du français "fourche"), gadget, du mot normand "gagée" = "petit outil"), pour en citer encore quelques-uns. Il Il y a même des pronoms, des prépositions, des suffixes, des structures syntaxiques, qui viennent clairement du (vieux) français. J'ai même enfin réalisé ici pourquoi les Anglais avaient deux termes pour désigner un animal, selon qu'il soit vivant ou plat du jour (hen/chicken, pig/pork etc).
SupprimerBref, oui, tu te régalerais avec ce livre, c'est sûr !;)
Oh, je vais adorer ! J'ai lu "honni soit qui mal y pense" d'Henriette Walter il y a un bail, sur le même sujet, mais on ne s'en lasse pas et je trouve le titre absolument génial (pas étonnant qu'il soit tiré de Dumas)
RépondreSupprimerOooh je m'empresse de noter ton titre. J'adore ce genre d'ouvrages ! Et comme tu dis, on ne s'en lasse pas.
SupprimerUn livre qui doit être passionnant et une référence, car impossible de le trouver d'occasion : ses acheteurs le gardent donc ! ;-)
RépondreSupprimerIl est en poche chez Folio. Oui, c'est le genre de livres que je garde dans ma bibliothèque.:)
SupprimerUn livre qui doit être passionnant et fourmillant d'informations ! Je comprends mieux pourquoi j'avais entendu dire que l'anglais venait du français par certains côtés !
RépondreSupprimerOui, c'est en lisant ce livre que j'en ai pris la pleine mesure. C'était vraiment fascinant de réaliser à quel point le français avait influé sur l'anglais.
SupprimerL'anglais est tout de même parsemé de mots allemands, mais je veux bien croire que la majorité soient issus du français.
RépondreSupprimerAh oui, il y a une part germanique certaine dans l'anglais, autant dans le vocabulaire que la grammaire. Des résidus tenaces et une évolution aussi du vieil anglais parlé avant l'invasion des Normands au 11e siècle.:) Mais c'est assez fou de réaliser à quel point l'apport français est en réalité plus important qu'on ne l'imagine.
SupprimerAh! il est dans ma PAL!! il faut que je l'en sorte rapidement! je savais que ça allait être réjouissant comme bouquin, tu confirmes!
RépondreSupprimerC'est sûr que tu vas te régaler (même si, comme je le disais, par moment, on a l'impression d'être plongé dans un dictionnaire étymologique^^).
SupprimerVoilà un livre tout à fait intéressant et un tantinet provocateur bien évidemment vu le titre. Toutes les langues évoluent et elles ont au fil de leur histoire emprunté des mots dans les autres langues...C'est bien vrai qu'il doit être passionnant ! A voir si je le trouve en tous les cas je le note.
RépondreSupprimerOui, les langues évoluent, c'est dans leur nature, surtout en côtoyant d'autres langues en effet. On ne comprend d'ailleurs plus si facilement les textes en vieux français.^^ Et je trouve ça fascinant de voir comment ces évolutions opèrent au fil des siècles.
SupprimerIl est marrant, le titre ! Si j'avais moins de romans à lire, je me lancerais bien sur ce bouquin...
RépondreSupprimerAh il ne faut pas hésiter à se faire plaisir parfois.;)
SupprimerBen non, je n'ai jamais appris l'anglais. A l'époque de ma lointaine jeunesse et dans mon milieu, on quittait l'école primaire à 14 ans. Point. J'ai appris un métier vite fait et au boulot. Et après ça ne s'est pas trouvé, j'avais d'autres choses à régler ... voilà voilà (et je le regrette encore).
RépondreSupprimerPeut-être que ce livre te donnera envie de t'y mettre en plongeant dans ses racines qui passent par le vieux normand.;) Il n'est jamais trop tard pour apprendre et on peut toujours aller à son rythme.
Supprimerah j'enseigne l'anglais et du coup les gens sont surpris quand je leur dis que plus de la moitié et voir plus de leurs mots sont d'origine française et je parle de Guillaume et aussi de l'influence saxonne .. du coup, je cite aussi des exemples. Je pense toujours à cet Américain qui disait que les français n'ont pas le sens des affaires et ne sont pas des "entrepreneurs" - il a fallu qu'un Français dans la salle lui rappelle que ce mot est en fait français... ;-)
RépondreSupprimerAh oui, cette anecdote est citée dans le livre, il me semble, ou je l'ai déjà entendue.^^ Il y a des exemples par paquet dans cet ouvrage, certains bien moins flagrants "qu'entrepreneur", c'est vraiment très surprenant.
SupprimerJe comprends que ce titre ait fait tilt dans ta tête, car il est effectivement super ! Je note, car le sujet est tout à fait intéressant !
RépondreSupprimerC'est instructif et divertissant, malicieux et sérieux tout à la fois. Que demander de plus ?^^
SupprimerCe livre il me le faut ! J'aime bien me dire qu'après tout, ce n'est pas nous qui "copions" mais eux ! Il y a déjà quelques années, comme je ne voulais pas utiliser le mot "anglais" spoiler", j'ai cherché une équivalence et découvert que le mot venait effectivement de l'ancien français.
RépondreSupprimerAhaha, je crois que nous nous copions mutuellement. C'est dans la nature des langues finalement et la proximité aidant... Oui, je pense que ce livre te plairait beaucoup.:)
SupprimerJe note ce livre, d'autant qu'il est court. Je préfère les livres courts pour le moment. J'ignorais que tant de mots anglais trouvent leur origine dans le français.
RépondreSupprimerC'est fou ce qu'on apprend avec ce livre. Il vaut largement le détour, pas si large d'ailleurs puisque le livre est en effet plutôt court.:)
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