CENDRILLONS
Saviez-vous qu'il existait plus de 500 versions de l'histoire de Cendrillon dans le monde ? Ici, l'auteure, Isabelle Genlis, s'intéresse particulièrement aux Cendrillons asiatiques et rassemble une douzaine de versions de ces contes venant de Chine, du Vietnam, du Japon, de la Birmanie, du Cambodge, de Corée, d'Indonésie, de Thaïlande et du Tibet, retranscrits et ré-racontés par ses soins.
En passionnée de contes en tout genre et de culture asiatique, je ne pouvais passer à côté de ce recueil !
Si ces versions sont assez différentes de notre conte occidental, bien que très reconnaissables sur le fond, elles présentent beaucoup de similitudes entres elles malgré quelques variations locales dues à leur adaptation nécessaire aux contextes historiques et culturels, et déroulent toujours le même fil.
On suit le parcours d'une jeune fille, toujours douce, tendre, belle et charmante, jalousée par la belle-mère, acariâtre, et la demi-soeur, invariablement laide et méchante. Le père est toujours assez anecdotique dans l'histoire, et sa fille se retrouve systématiquement maltraitée et asservie par la belle-famille, mais reste charmante en toute circonstance.
Il y a une fête ensuite, pas forcément royale, mais c'est l'occasion pour les jeunes filles de se parer de leurs plus beaux atours dans le but de se faire remarquer, par un roi, un prince, un préfet... Évidemment, la Cendrillon étant de corvée, elle ne peut assister à la fête mais... on sait que ça ne se finira pas ainsi.^^
Et s'il n'y a pas de fête, comme dans certains contes, un roi, prince ou préfet tombera, comme de par hasard à un moment dans l'histoire, sur un objet appartenant à la jeune fille et fera rassembler toutes les filles du coin pour identifier la propriétaire de l'objet.
Dans ces contes, on ne croisera pas de bonne marraine la fée, mais d'autres créatures surnaturelles qui viennent en aide à notre Cendrillon (des poissons rouges, des tortues, des arbres, incarnés par un esprit magique ou une divinité, ou souvent aussi par l'esprit de la mère défunte) (les lois du karma et de la réincarnation sont bien ancrées dans ces contes aussi). À ce propos, j'ai trouvé cela très étonnant la vertu accordée aux os ou aux arêtes. C'est une constante d'un pays à l'autre de devoir retrouver et enterrer les os ou arêtes d'une de ces créatures surnaturelles pour que la magie opère (sauf dans un conte coréen qui fait intervenir, grosse variante, une vache noire, et même une fée).
J'ai noté aussi que la notion "d'avant minuit" n'avait été évoquée que dans un seul conte, tibétain.
Par ailleurs, il n'y a pas systématiquement une pantoufle ou une chaussure perdue dans l'histoire, mais d'autres objets (pince à cheveux, bol sur la tête) ou d'autres variantes encore (la voix, le chant).
Si on peut s'étonner, dans notre conte occidental, qu'un prince puisse tomber amoureux d'une jeune fille au premier coup d'oeil, mais oublier aussitôt son physique au point de devoir faire essayer une chaussure à toutes les jeunes filles pour retrouver l'heureuse élue, en Asie, c'est pire, les princes n'ont parfois même pas vu la femme de leur vie. C'est sur la base d'un objet trouvé par hasard qu'ils décident que c'est elle.^^
Au début de chaque conte, l'auteure explique le symbolisme de toutes ces apparitions et objets, ainsi que d'autres éléments du conte spécifiques à la culture asiatique.
L'histoire des Cendrillons asiatiques s'arrête rarement au mariage. D'ailleurs, parfois cette étape est vite atteinte. C'est l'après-mariage qui est davantage développé et plus ou moins déterminant. Car la belle-famille n'en reste jamais là et nos Cendrillons peuvent aussi avoir quelques désirs de vengeance. Et les fins de ces contes ne sont pas systématiquement heureuses.
J'ai trouvé amusant les différences culturelles Asie vs Occident, comme les habits portés pour les fêtes royales. Foin des grandes robes de bal façon Disney ! Pour être la plus belle, c'est tunique de soie et pantalon bien long au Vietnam, avec une écharpe brodée et emperlée, et une paire de sandales brodées. Pour la fête de la récolte au Japon, élégance rime avec kimonos soyeux, obis, éventails, et épingle à cheveux en lieu de soulier perdu. Sans oublier les sourcils dessinés !
Et rien de mieux que du riz pour constituer un bon repas.:)
En cela, ces contes sont fraîchement dépaysants, avec des traditions propres à chaque pays, même si au bout du sixième, on commence à vraiment bien connaître la chanson (dont on avait déjà l'air en plus^^).
Parmi tous ces contes, j'ai particulièrement aimé l'histoire de Porte-Bol (conte japonais), assez originale dans le genre, un conte birman également, avec une petite allusion à une scène du Petit Chaperon rouge, et un conte indonésien, Ail blanc et Échalote, avec une allusion à une scène des Fées (version conte de Perrault). Ce dernier se termine bien d'ailleurs, sur un mariage heureux point.
J'ai trouvé assez amusant également les métaphores ou comparaisons si typiquement asiatiques :
"Le prince demanda Bawang Putih en mariage. Elle accepta et leur vie eut le goût fruité de l'ail blanc."^^
L'auteure
Après des études théâtrales et une initiation au conte par le griot Sotigui Kouyaté, Isabelle Genlis se spécialise dans la littérature orale asiatique et rassemble un répertoire dense de contes, épopées, légendes. Elle a créé une dizaine de spectacles, accueillis dans des festivals internationaux, des théâtres, des musées, en France et à l'étranger.
Fort plaisant à lire, ton billet! Mais je vais en rester là.
RépondreSupprimerOn connaît l'histoire de Cendrillon et j'ai pas mal détaillé les quelques différences avec les versions asiatiques.;)
SupprimerOh cela semble trop trop bien....ouiiiii
RépondreSupprimerSurtout si l'on s'intéresse aux contes en général et à la culture asiatique.:)
SupprimerJe me doutais pour la multitude de versions, mais je n'ai jamais pensé version asiatique, très intéressant cette mise en perspective.
RépondreSupprimerCe fut une surprise pour moi aussi. On sait en effet déjà qu'il existe quelques versions antérieures moins lisses et plus hardcore de notre conte à la Disney en Europe même, mais je ne visualisais pas des versions de Cendrillon en Asie.
SupprimerJ'aime tellement les réécriture des contes de fées ! Je note !
RépondreSupprimerOui, j'ai remarqué que c'était ton créneau aussi.:)
SupprimerC'est sûr que, pour l'adepte de contes que tu es, c'est parfait. J'aimerais y jeter un coup d'oeil, peut-être pas tout lire...
RépondreSupprimerJ'avoue que même en tant que d'adepte, j'ai commencé à m'essouffler un peu à la septième version du même conte.^^ À lire par petit bout, comme certains recueils de nouvelles.
SupprimerCela a l'air bien intéressant ! merci pour la découverte :)
RépondreSupprimerAvec plaisir ! Je viens de t'envoyer un message pour t'alerter que mes commentaires sur ton blog ne passaient pas... J'espère que ça finira par se résoudre.
SupprimerÇa ne me tente pas plus que ça...
RépondreSupprimerLe contraire m'eut étonnée.:)
SupprimerNon je ne savais pas, pour répondre à ta question d'ouverture. Ca peut être amusant et intéressant quelque part, mais j'ai peur de me lasser ! Et elles s'appellent toutes Cendrillon ?
RépondreSupprimerBen non, Cendrillon, c'est spécifiquement français.;) Elle s'appelle d'ailleurs Cinderella chez les anglophones, pour très exactement le même conte, et à l'origine, ça devait être encore différent.
SupprimerJ'aime beaucoup le congé de Cendrillon. Je suis assez intéressée à découvrir cet ouvrage pour le volet culturel. Pour éviter la lassitude,, on picore : un d'histoire par jour, non ?
RépondreSupprimerLe problème c'est que je ne sais pas picorer, mais sinon oui, je le recommande.;)
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