traduit du coréen par Choi Kyungran et Pierre Bisou
Je reprends ici quelques mots glanés ici et là en parcourant rapidement des critiques de presse ou de lecteurs : "récit onirique et mélancolique, contemplation de la nature", "quête poétique, spectrale et hallucinatoire" (La Croix), "itinéraire onirique et mémoriel" (Le Monde).
Le tableau est clair et si j'y suis retournée plusieurs fois pour vérifier que l'effet que me produisait ce roman était bien celui qu'il avait produit chez d'autres, c'est que je ne m'attendais pas à ce type d'atmosphère et que j'espérais quelque part que c'était un effet passager et non central.
Parce que voilà, moi, les romans des souvenirs (traumatiques en plus) que l'on ressasse comme dans un état semi-hypnotique, quasi second, l'esprit flottant entre réel et fantastique, aussi éblouissants, envoûtants, splendides et virtuoses soient-ils, j'ai plutôt tendance à ne pas m'y aventurer bien volontiers.
Si je me suis empressée de le noter au départ, c'est que 1) j'aime beaucoup la littérature coréenne, 2) je n'avais pas toujours lu cette fameuse autrice, Han Kang, 3) ce roman avait redoré le blason de la littérature coréenne aux yeux d'une amie lectrice qui, jusqu'à présent, n'avait lu que des romans coréens (enfin, deux ou trois) qui lui étaient tombé des mains. Forcément, j'étais curieuse de ce miracle littéraire.
Aaah si j'avais su que c'était dans la veine "onirique", "poétique", "mélancolique", je n'y aurai pas laissé l'ombre d'un oeil.
Et pourtant, ai-je détesté cette lecture pour autant ? Absolument pas. Je me suis étrangement laissée porter par ces mots et cette imagerie qui étaient pourtant loin de ce qui peut me faire vibrer habituellement. Sans être transcendée, mais absorbée tout de même, terriblement intriguée et troublée par ce qui se déroulait, et empathique, presque.
De façon particulièrement subtile, délicate, minutieuse (et onirique et poétique donc), Han Kang évoque un chapitre de l'histoire inconnu de la plupart des Sud-Coréens jusqu'en 2008, le massacre de civils présumés communistes par la police et l'armée au début de la guerre de Corée. Environ 30.000 morts sur l'île de Jeju où se déroule majoritairement l'intrigue de ce roman, et jusqu'à 200.000 morts sur le reste du pays.
Les faits ne sont pas exposés de but en blanc dès les premières pages, non. C'est un "long" voyage à la fois réel et métaphorique qui nous y mène, où la neige semble un personnage à part entière. On sent que l'indicible est tapi dans l'ombre et n'attend que le bon moment pour en sortir, ou que tout ceci n'est que procrastination pour affronter ses démons. En attendant, on subit un peu... l'attente, justement. Le temps semble en suspens, tout semble flottement. Contemplation. Méditation. Les mots "nature writing" (pas trop ma tasse de thé) me sont même venus en tête. Les descriptions des paysages et de la neige sont très visuelles, presque cinématographiques, détaillées plan par plan (gasp). Là, j'ai pensé "film d'art et d'essai". Sauf qu'à défaut de visionner un film, tout nous est décrit goutte à goutte, ou devrais-je dire, flocon à flocon.
Mais encore une fois, étrangement, j'étais plus envoûtée par cette narration hypnotique que terrassée d'ennui et de désespoir (comme ça aurait pu arriver).
Sur le dernier tiers du livre, les événements tragiques, ressurgis d'une étrange vision et d'archives conservées par la famille d'un des personnages. Et là, on ne peut que se taire.
Enfin, j'avoue tout de même m'être un peu mélangée dans les dates, les données chiffrées, l'ordre des événements, les membres de la famille (à qui il est arrivé quoi et quand entre le père, l'oncle, la mère, la tante, la grand-mère...)...
L'autrice
Née en 1970 à Gwangju, Han Kang a étudié la littérature à l'université de Yonsei, à Séoul. Elle débute sa carrière littéraire comme poétesse puis publie son premier roman à l'âge de 24 ans. En 2016, elle remporte le Booker Prize pour La Végétarienne. Elle est aujourd'hui considérée comme la plus grande autrice coréenne, la parution de chacun de ses livres constitue un événement dans son pays et à l'international.
Le côté onirique et le thème abordé, dont je ne connais rien d'ailleurs, m'intriguent. Merci pour cette découverte.
RépondreSupprimerAvec plaisir.:)
SupprimerOuh là, finalement, cela s'est bien passé et tu ne regrettes pas? J'en serais presque curieuse (mais je garde le cap ^_^)
RépondreSupprimerOui, étonnamment ça s'est bien passé, j'ai tout lu jusqu'au bout, sans souffler, et même intéressée par ce qui se déroulait, mais je ne pourrais pas affirmer que j'ai adoré. Curieux.:)
SupprimerJe me suis aussi posé des questions en cours de lecture: est-ce que j'aimais vraiment ce côté onirique ? mais comme toi, je me suis laissée porter. J'ai quand même été un peu décontenancée par les parties qui sont très différentes l'une de l'autre.
RépondreSupprimerOn se rejoint beaucoup dans notre ressenti de lecture. Son insistance sur certains éléments du récit était assez perturbante aussi, et là je ne parle pas de la neige qui visiblement a une symbolique forte chez elle, mais de détails dont on aurait pu se passer. Malgré tout, ça restait captivant, même ces détails.
SupprimerAh la la, ça aurait tout pour me faire fuir aussi, mais si tu n'as pas abandonné et même en quelque sorte envoûtée, cette actrice doit être sacrément douée !
RépondreSupprimerOui, il n'y a pas de doute. Ce roman aurait dû me tomber des mains assez vite, mais étrangement, je tournais les pages, absorbée par ce qu'elle racontait.
SupprimerJ'aime beaucoup la littérature asiatique bien qu'elle soit souvent déroutante. En revanche, j'ai toujours eu du mal avec les univers oniriques. J'ai hésité à me joindre à cette lecture mais j'ai l'impression que j'ai bien fait de m'abstenir... ou peut-être que non...
RépondreSupprimerFranchement, ça se tente. Pour moi, ça s'est finalement bien passé, même si ce n'est pas ce que je préfère en lecture habituellement. Je reste mesurée car ce n'est ni un coup de coeur ni une révélation, mais je ne regrette vraiment pas cette lecture.
SupprimerOnirique et poétique... ça me freine carrément... mais aussi des dates et des données chiffrées ! J'avoue que ce mélange curieux donne envie d'aller y voir de plus près, ne serait-ce que quelques pages.
RépondreSupprimerJ'avoue que plus j'y pense, plus je me dis qu'elle a réussi là un tour de force assez incroyable. C'est un mélange assez déroutant. Après je n'ai pas été conquise à 100% , mais j'ai lu ce livre sans déplaisir tout le long et j'y ai trouvé un réel intérêt. Vraiment curieux.
Supprimerje ne l'ai pas trouvé si onirique que cela (comparé à d'autres auteurs asiatiques), je l'ai trouvé quand même ancré sauf évidemment lorsqu'elle se demande si tout est réel (l'oiseau, Inseon) du coup ça ne m'a pas dérangé même si je reconnais qu'il est plus onirique que ses autres livres. J'ai aussi découvert tout un pan de l'histoire coréenne. et comme je le dis sur mon blog, j'adore la neige et dans son recueil, qui est magnifique, elle en parle tellement bien ! en tout cas, tu n'as pas lâché l'affaire !
RépondreSupprimerOui, je n'ai même pas ressenti l'envie de lâcher l'affaire et je n'ai même pas lu en diagonale, à aucun moment.^^ Je me disais juste, c'est étrange, normalement je n'aime ce genre d'atmosphère (je ne suis pas très sensible à "l'onirique" ni au poétique) (ni à la neige^^) et ce n'est pas que je l'aime ici, mais je suis quand même absorbée par ce qui se déroule. Il faudrait que je tente un autre de ses livres pour savoir si j'adhère vraiment à son univers. Son écriture et son sens de la narration assez unique, c'est sûr que oui.
SupprimerSi tu as aimé ce roman d'un genre que tu n'apprécie pas, il doit être très bien.
RépondreSupprimerOui, le constat est sans appel. :)
SupprimerJe ne suis pas franchement attirée par ce genre de livre, je ne crois pas que je vais y jeter un oeil (j'ai une PAL assez conséquente comme ça).
RépondreSupprimerC'est ce que je me serais dit si j'avais lu le résumé ou les quelques avis mentionnés dans mon billet, si je savais dans quoi je m'embarquais en somme, mais finalement, je ne regrette vraiment pas cette lecture.
SupprimerBin j'avoue que vraiment il ne m'attire vraiment pas....je reste sur ma liste de coreens-nes a lire....mais pas celui-ci....;)
RépondreSupprimerJe comprends. Je te renvoie à ma réponse à Aifelle (ci-dessus).^^
SupprimerTu es un peu moins enthousiaste que tes co-lectrices, mais positive tout de même. Quant à moi, j'ai lamentablement manqué ce rendez-vous, je n'avais même pas noté cette LC !
RépondreSupprimerPeut-être trop de LC prévues déjà ?^^ Ce n'est pas bien grave, tu pourras toujours le lire plus tard. Très curieuse de ton avis en tout cas !
SupprimerOn a frôlé l'incident diplomatique! 🤭 Je suis ravie que l'écriture de Han Kang ait réussi à te porter jusqu'au bout malgré tout. Promis je mettrai plus de mots-clés là prochaine fois 😁
RépondreSupprimerAhaha, tu n'es pas en cause, tu avais bien annoncé la couleur, mais j'ai été plus marquée par ton enthousiasme qui m'a, de fait, terriblement intriguée. En tout cas, je préfère l'avoir lu en étant un peu décontenancée que d'avoir passé mon chemin en estimant que je n'y trouverais sûrement pas mon compte.:)
SupprimerA priori, pas pour moi !
RépondreSupprimerIl ne me semble pas que tu sois le public cible en effet.:)
Supprimerj m suis dit que tu devais avoir lu cette auteur primée, mais j'ai du taper sur google han kang lectures sans frontières pour trouver. Comment cherche-ton sur ton blog?
RépondreSupprimerBouhouhou, personne ne pense à regarder en haut à gauche. Bon, comme tu n'es pas la première à me le demander, j'ai ajouté l'outil de recherche dans la colonne de droite, bien visible.^^
Supprimeren haut à gauche? Je suis revenue et là bingo, ça m'a tout de suite sauté aux yeux, merci!!!
SupprimerAvec plaisir.:)
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