LE LECTEUR DE CADAVRES

LE LECTEUR DE CADAVRES

traduit de l'espagnol par Nelly et Alex Lhermillier

Quel titre macabre auquel j'ai eu du mal à me faire ! Jusqu'à ce que je réalise qu'il n'y avait pas de meilleure description de cette pratique qui consiste donc à examiner les corps en détail dans le but d'établir les circonstances d'un décès. En gros, ce roman écrit par l'auteur espagnol, Antonio Garrido, aurait pu s'intituler "Les Experts... dans la Chine médiévale"^^ (enfin, plus précisément, la Chine Impériale du XIIIe siècle). 😆

Ce roman relate en effet l'histoire du premier médecin légiste de l'histoire, le Chinois Song Ci. Cela peut paraître surprenant, mais il est mondialement considéré comme le précurseur et père de la médecine légale. Bien qu'ayant largement romancé et brodé autour de sa vie personnelle dont il subsiste peu de traces, l'auteur s'est appuyé entre autres sur les cinq volumes de son traité légiste publié en 1247 (!!!) pour bâtir son récit et reconstituer les faits historiques sur les débuts de la médecine légale.

Je pensais au départ qu'en terme d'intrigue, on allait suivre un personnage qui, après des études brillantes et sans remous dans une prestigieuse académie, se trouverait confronté à des cas de morts suspectes dont il aurait la charge d'expliquer les causes par des expertises médico-légales, mais l'auteur a dû trouver cela trop simple. 😆

Dès le départ, il accable Song Ci de toute sorte d'infortunes, de malheurs et de mauvaises rencontres (j'ai rarement vu un personnage aussi poisseux en fiction) qui semblent l'éloigner à tout jamais de son rêve de devenir juge et de son destin de premier médecin légiste. Ça en était presque désespérant ! Ce qui est terrible, c'est qu'on sait qu'il va forcément se sortir de toutes ces terribles épreuves, mais on ne peut s'empêcher de stresser pour lui. Je me suis dit que Garrido était peut-être le genre d'auteur qui aimait bien mettre ses personnages dans des situations quasi inextricables pour voir comment il arriverait à les en sortir. Quel tordu !

Notre Song Ci finit toutefois par pouvoir poursuivre les études qu'il ambitionnait, et bien qu'impulsif et impétueux (bon, il est jeune, tout juste 20 ans, il me semble), sa méticulosité dans l'examen des corps, sa sagacité, les précisions de ses observations et son goût de la vérité et de la justice le démarquent de ses pairs, à tel point qu'il se fait convoquer par l'Empereur himself pour enquêter sur une série de meurtres qui menacent la paix impériale. Les choses se compliquent (la poisse jusqu'au bout 😆) quand il réalise que sa propre vie est en jeu.

Mon avis Goodreads

Un bon 4,5/5 étoiles qui tend vers les 5 étoiles. Un roman historique passionnant et dépaysant, à la trame policière efficace, avec moult rebondissements et retournements de situations pour notre plus grande palpitation ! J'étais quasi en apnée tout au long de ma lecture. J'ai beaucoup aimé cette immersion dans la Chine médiévale et particulièrement adoré le côté enquête et les expertises médico-légales. C'est tellement épatant, bluffant, tout ce qu'on peut déduire de l'examen approfondi des corps, surtout à une époque où la technologie était encore à un stade relativement primaire, avec de nombreux interdits quant à la manipulation des corps.

J'ai un peu souffert toutefois de l'inverse des facilités d'auteur (oui, je ne savais pas que ça existait, moi non plus). Ici, le destin/l'auteur s'est un peu acharné sur notre héros, me laissant plus d'une fois dans le désespoir le plus profond, ça me tendait même, à un point où je redoutais parfois de reprendre ma lecture. Un petit côté éprouvant donc, on n'est jamais complètement serein, mais ça reste une lecture très prenante, un page-turner redoutable où l'on est constamment dans le doute, et cela va en s'amplifiant jusqu'à la toute fin du roman !

Cerise sur le gâteau, ce livre est culturellement très instructif sur la Chine ancienne, que ce soit d'un point de vue social, économique ou politique. On en apprend beaucoup sur les moeurs, traditions, rites, croyances, modes de vie et les lois de l'époque, et même sur la vie dans la Cour impériale. Ce qui m'aura le plus marquée, c'est qu'on dormait sur des oreillers de pierre (véridique ! 😲 On trouve quelques photos sur le net !).

LC avec Maggie, Rachel, Stéphanie, Sarah.

Intègre le Défi lecture 2023 (5/30/100) => catégorie 88 (une couverture avec un personnage qui a quelque chose sur la tête (chapeau, turban, foulard, casquette, couronne...) Ici, un bonnet bialar qui, à l'époque, reflétait le statut social d'une personne).

L'auteur

Antonio Garrido est né en Espagne en 1963 et enseigne à l'Université polytechnique de Valence. Passionné depuis l'enfance de romans d'aventure, son premier roman, La Scribe, a été un best-seller en Espagne et à l'étranger. Le Lecteur de cadavres a obtenu en 2012 le Prix international du roman historique.