THE PROMISE
( LA PROMESSE )
Dès que j'ai vu ce roman sud-africain de Damon Galgut sur le planning de lecture de la cinquième édition du Prix Bookstagram du roman étranger 2022, j'en ai fait une urgence. Le thème, autour des questions raciales, me parlait beaucoup, et je n'avais pas lu grand-chose sur le sujet en Afrique du Sud, me tournant plus naturellement vers les États-Unis dès qu'on l'aborde, alors que bon, l'Apartheid, c'est un sacré dossier aussi...
Le contexte de l'histoire m'intéressait tout particulièrement :
"1986, Pretoria. Rachel, matriarche de la famille Swart, a fait une promesse avant de mourir : léguer à Salome, leur domestique noire, la maison dans laquelle elle vit."
Une décision qui n'est pas du goût de tous et qui divise le clan. Seule Amor, encore enfant à la mort de sa mère et marquée par sa requête, semble lui attacher de la valeur et de l'importance. Une promesse est une promesse, non ? Mais celle-ci sera-t-elle tenue ?
Je pensais au départ que ce roman serait le récit de la bataille autour de l'acquisition de cette terre, mais en fait, c'est beaucoup plus réaliste et complexe que ça. D'ailleurs, à l'époque, promesse ou non, il était légalement impossible pour un Noir d'être propriétaire. Mais après l'Apartheid ?
Le roman suit les Swart sur trois décennies, de 1986 à 2018, et se divise en quatre parties marquées par quatre drames familiaux auxquels font écho quatre moments charnières de l'histoire sud-africaine.
Les événements sont racontés à travers la voix et le regard des Swart, une famille dysfonctionnelle et autocentrée, et vu de leur perspective, les Noirs sont quasi invisibles, insignifiants. Cela m'a particulièrement frappée parce qu'en tant que lectrice, j'avais en tête, comme Amor, cette promesse que j'espérais voir tenue, or elle n'était quasiment pas évoquée par la famille, ignorée comme une parole en l'air, et cela me hantait. Je trouvais cela franchement blessant, tout comme devait très certainement le ressentir Salome.
À mesure que la grande Histoire de ce pays évolue, ils s'adaptent plutôt bien aux nouveaux contextes, ils font avec, sans animosité vraiment visible, mais on sent que l'ombre du passé plane encore et que tout n'est pas réglé.
À travers l'histoire de cette famille, l'auteur nous dresse un portrait sans fard de la société sud-africaine et nous dessine en filigrane l'histoire de l'Afrique du Sud, ce que j'ai trouvé particulièrement intéressant et instructif. Un vrai bonus plus auquel je ne m'attendais pas vraiment.
Ce qui m'a le plus marquée et impressionnée toutefois, c'est le style narratif, extrêmement original et maîtrisé, qui plonge le lecteur dans un vaste flux de conscience où les dialogues sont intégrés au récit sans guillemets ni tirets, où l'on passe d'un personnage à l'autre, d'une pensée à l'autre, sans signal clair, et pourtant, tout est agréablement fluide et parfaitement limpide. J'ai vraiment trouvé ça assez dingue comme effet. J'ai beaucoup aimé aussi la voix narrative qui inclut le lecteur dans le récit, lui donnant l'impression de participer à une visite guidée au sein de cette famille quelque peu dysfonctionnelle. La structure narrative aussi était une véritable réussite.
Et les personnages ! Par moment, j'avais du mal à définir si j'étais dans une tragédie ou une comédie. Il y avait beaucoup de moments très drôles, du fait de certains personnages notamment. L'auteur excelle vraiment à retranscrire le pathétique chez l'humain. Je ne savais plus s'il fallait rire ou pleurer. La psychologie des personnages (tous, jusqu'au plus secondaire, jusqu'aux chacals même !) est très bien rendue, tout comme les scènes retranscrites avec beaucoup de réalisme.
Je ne suis pas très "histoires de famille" habituellement, mais là, c'était assez truculent !
Une histoire bien triste quand même, poignante et tragique, avec, en fond, une ironie assez piquante qui m'a beaucoup amusée.
Intègre le Défi lecture 2023 (21/30/100) => catégorie 72 (livre dans lequel un médicament est cité (Anusol))
L'auteur
Damon Galgut, né en 1963 à Pretoria, en Afrique du Sud, est l'un des plus célèbres romanciers de son pays, lauréat de nombreux prix littéraires. La Promesse a remporté le Booker Prize en 2021.
je ne connais pas du tout l'auteur. Je viens de voir sur Internet que le roman a été récompensé par le Booker Prize en 2001
RépondreSupprimerJe t'avouerais que je ne connaissais pas non plus l'auteur avant d'avoir découvert le bookclub autour de son livre sur Instagram.^^ J'aime ce genre de trouvailles précieuses au détour des réseaux.
SupprimerPas la peine d'en ajouter, il était déjà noté dans une de mes biblis. Je n'ai plus qu'à y penser la prochaine fois, quoi.
RépondreSupprimerTes biblis sont vraiment incroyables. Je crois même qu'elles sont mieux fournies que celle de mon quartier boulot.^^
SupprimerOh punaise...tu donnes bigrement envie lala.....un roman bien mene....
RépondreSupprimerJe le recommande chaudement ! Tu n'en regretteras pas la lecture.;)
SupprimerLe style semble impressionnant, d'après ce que tu en dis, et il faudrait voir ce que donne la traduction... un défi de le traduire, non ?
RépondreSupprimerMa co-lectrice l'a lu en français et on était unanimes sur le style qui est vraiment admirable, donc a priori, pas de souci de traduction (ou plutôt, traduction réussie^^). Une lectrice que je suis sur Instagram et qui l'avait lu l'année dernière a aussi évoqué la narration en premier en reparlant de ce livre avec nous. Ça l'avait visiblement marquée aussi.
SupprimerUn très bon roman que j'avais beaucoup aimé aussi. Si tu veux continuer avec l'auteur, je te recommande chaudement "Arctic Summer", où il est question d'un de mes auteurs préférés : E.M. Forster.
RépondreSupprimerMerci pour la recommandation ! Oui, je poursuivrai très certainement. Tu me fais d'ailleurs penser que je n'ai toujours rien lu de Forster, mais c'est en projet (depuis des années^^).
SupprimerAvant mon voyage en Afrique du Sud en sept 2019, j'avais pas mal lu de romans sud Africain, ce qui m'avait permis de ne pas arriver trop "bleue" dans ce complexe pays. Donc m'y remettre me plairait bien, car c'est un pays qui m'a vraiment marquée ! je note donc !
RépondreSupprimerOui, je me souviens de ta plongée dans ce rayon. J'ai lu quelques romans sud-africains aussi et je n'ai jamais été déçue. Je devrais explorer davantage dans cette littérature, en attendant le vrai voyage.^^
SupprimerCe que tu dis du mélange (visiblement très réussi) de comédie et de tragédie m'intéresse beaucoup, sans parler du thème. Et hop, dans ma PAL!
RépondreSupprimerCe n'est pas une franche comédie, mais il y a des personnages et des situations irrésistiblement cocasses.:) J'espère que tu apprécieras cette lecture autant que moi, mais si le thème t'intéresse, c'est bien parti pour.
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